Justice12 juillet 20170Apprentissage du contrat social en prison

Inspirés de la pratique carcérale espagnole, les modules de respect ont été mis en place au début 2015 au centre pénitentiaire de Mont de Marsan, ouvert sept ans plus tôt. Ils concernent à la fois la maison d’arrêt et le centre de détention. Le principe des modules de respect, c’est, dit le règlement intérieur, « de mener une vie la plus digne possible, en favorisant la convivialité. »

 Les modules de respect existent maintenant dans une dizaine d’établissements pénitentiaires en France. Ils reposent sur la signature d’un contrat entre le détenu et la direction de l’établissement où il est incarcéré. En contrepartie d’engagements auxquels il souscrit, les contraintes de la détention sont allégées.Les personnes détenues se lèvent le matin à l’heure convenue, prennent en charge l’entretien de leur cellule, se déplacent librement au sein du module et peuvent prendre leur déjeuner avec d’autres. Certains participent aux commissions « hygiène », « accueil », « régulation des conflits » et « activités ». La frustration de la porte fermée que l’on tambourine lorsqu’on a un besoin urgent de communiquer a disparu : il suffit de parler au surveillant que l’on croise dans le bâtiment.

Les infractions à certaines règles acceptées dans le contrat entraînent l’exclusion immédiate du module de respect : par exemple, la détention de produits stupéfiants ou d’un téléphone portable. Un système de bonus et de malus existe également : des « mauvais points » attribués pour des infractions mineures peuvent être compensés par les « bons points » apportés par un comportement conforme.

Du côté des surveillants, l’attitude est contrastée. Si certains regardent avec méfiance cette innovation, d’autres y voient l’occasion de retrouver le sens de leur métier. Ils reçoivent les nouveaux arrivants et proposent leur affectation, ou non, dans le module de respect. Ils participent à la commission technique pluridisciplinaire chargée d’évaluer le comportement des détenus. Certains se portent volontaires pour animer des activités sportives, en semaine ou en weekend, sur leur temps de travail. On constate aussi généralement une baisse du niveau de tension entre détenus et personnel pénitentiaire.

Les modules de respect réinventent la détention en privilégiant son rôle comme un moment de préparation à la sortie. La notion de contrat est centrale. L’incarcération a pour effet d’infantiliser le détenu, dont les moindres mouvements sont commandés par l’organisation pénitentiaire. Par opposition, le contrat par lequel le détenu s’engage à participer aux modules de respect est une manière d’anticiper la vie d’après la prison, lorsqu’il faudra signer des contrats de travail, d’ouverture de compte ou de location.

Les modules de respect avaient vocation à être généralisés à l’ensemble des établissements pénitentiaires français. Le fait qu’une dizaine d’établissements les aient organisés démontre leur intérêt. Mais ils ne représentent que 5% du parc pénitentiaire national. La Direction de l’Administration pénitentiaire souffre du changement de gouvernement et de la démission récente de son directeur. Espérons que la dynamique enclenchée retrouve du souffle.

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