Cinéma30 décembre 20160Paterson

Avec « Paterson », son dernier film, Jim Jarmush compose une ode à la poésie et à l’amour conjugal.

Paterson est une ville du New-Jersey qui n’a d’autre atour que d’avoir vu naître des poètes. C’est là que vit Paterson, un homme d’une trentaine d’années, identifié à sa cité au point d’en porter le nom. Paterson (Adam Driver) est chauffeur d’autobus. Derrière la routine de journées semblables les unes aux autres, il cache sa passion secrète : écrire des poèmes. D’autres poètes se sont retranchés derrière l’apparente normalité d’un emploi subalterne, tels Fernando Pessoa ou Jean de la Ville de Mirmont.

Son écriture se nourrit jour après jour des nouveautés minuscules de sa vie minuscule : une nouvelle marque de boîtes d’allumettes, une averse sur les cheveux d’une petite fille, une conversation entendue dans l’autobus qu’il conduit. Sous le regard de Paterson, la ville est transfigurée, elle acquiert une sorte d’irréalité fascinante.

L’amour de Paterson, c’est sa compagne, Laura (Golshifteh Farahani). Laura est persuadée que son compagnon est un grand poète, elle n’a de cesse de le convaincre de publier ses poésies. Elle-même a une passion pour le beau. Elle habille la réalité de noir et de blanc, de disques et de triangles. Elle sait qu’elle fera fortune en vendant des biscuits décorés à sa façon. Elle se voit en chanteuse rock. Elle adore Paterson ; Paterson la vénère.

Chaque soir, Paterson va au bar, laisse son chien à la porte, consomme une bière et se laisse imprégner par l’ambiance, par la gouaille du barman Doc (Barry Shabaka Hewley) et la déprime permanente d’Everett (William Jackson Harper). Occasionnellement, il cogne, se rappelant de son passé de soldat. Lorsqu’il revient dans le lit conjugal, Laura aime son haleine de bière.

Le cinéma est friand des déchirures du couple. Il est rare de voir mise en scène la fascination réciproque de deux amants aimantés par leurs différences, capables de vivre une vie étincelante dans une apparence de morosité, sans un éclat de rire, mais avec dans le cœur un bonheur profond.

Paterson est un film qui respire le bonheur.

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