« 21 nuits avec Pattie », film d’Arnaud et Jean-Marie Larrieu, plonge le spectateur dans un univers étrange où l’énorme côtoie le subtil, un univers de forêt obscure, de fantôme et de nécrophile.
Caroline (Isabelle Carré) vient enterrer sa mère Isabelle décédée dans sa grande maison à la limite d’un petit village de moyenne montagne. À vrai dire, elle ne sait pas grand-chose d’elle, qui a mené une vie libertine et ne s’est jamais occupée de son éducation. Caroline est à l’opposé de « Zaza », nom donné à la défunte par ses nombreux amis. Elle a une vie bien rangée avec son mari Manuel (Sergi López) et ses deux petites filles ; une vie que la libido a désertée depuis longtemps.
Or la femme de ménage et confidente de Zaza, Pattie (Karin Viard), est une libido ambulante. Elle raconte par le détail à une Caroline époustouflée ses aventures charnelles avec André (Denis Lavant), un homme du village aussi doté de puissance sexuelle que dénué de mots.
Voici que le corps de la défunte disparait. La police évoque l’enlèvement par un nécrophile, un homme si éperdument amoureux de Zaza et si frustré de ne l’avoir jamais possédée, ou de l’avoir irrévocablement perdue, qu’il fait l’amour avec son cadavre. L’auteur serait-il Jean (André Dussollier), l’énigmatique « écrivain » à qui Caroline, dans son imagination fertile, attribue l’identité de Jean GM Le Clézio ? Ou bien Kamil (Jules Ritmanic), le fils de Pattie, à qui Caroline prête une attirance pour les femmes mûres ?
Le film des frères Larrieu n’est pas un polar : nous ne connaîtrons jamais l’identité de l’auteur de l’enlèvement de la dépouille de Zaza. Et pour cause : c’est un film sur la violente obscurité du désir. La nature conspire pour réveiller et exaspérer les sens : la rivière dans laquelle on plonge son corps nu, la forêt dense et sombre comme celle du Petit Poucet, et jusqu’à ce champignon en forme de phallus.
Les acteurs sont formidables : Isabelle Carré en ingénue recevant en plein cœur et en plein corps un raz de marée d’érotisme, Karin Viard désopilante et touchante en nymphomane décomplexée, André Dussollier mystérieux et insaisissable et Denis Lavant, comme dans beaucoup d’autres films, en OVNI bousculant des vies trop tranquilles.
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