L’Atelier des lumières, qui se présente comme le premier centre d’art numérique à Paris, a ouvert ses portes en avril dernier : il offre au spectateur une expérience unique d’une grande intensité.
L’Atelier occupe la nef d’une fonderie construite au milieu du dix-neuvième siècle dans le 11ième arrondissement de Paris. Il occupe un vaste espace, 3 300m² de surface ; 120 vidéoprojecteurs ont été installés, braqués sur les murs et sur le sol ; une sonorisation de grande qualité complète l’installation.
Trois « expositions » se succèdent en une heure environ : « Klimt », « Hundertwasser » et « Poetic_Al ». Le mot « expositions » mérite une qualification. Le site Web de l’Atelier parle « d’expositions immersives monumentales ». Les adjectifs « immersives » et « monumentales » paraissent pédants, mais décrivent bien ce dont il s’agit.
Le spectateur déambule dans l’ancienne fonderie comme il le ferait dans une exposition de peinture. Mais son attention n’est pas focalisée sur un tableau. Il est totalement immergé dans un océan d’images et porté par des musiques symphoniques ou d’opéra. Il est parfois étourdi par la noria, particulièrement lorsque le mouvement prend place sous ses pieds.
Parfois, des détails de l’œuvre d’art filmée prennent une importance démesurée : une étoile, des voiliers, des arbres vus en relief. Mais l’attention est à peine sollicitée que déjà l’on passe à autre chose. Le tableau de Klimt ou de Schiele perdent de leur importance. Ce qui compte, c’est l’œuvre produite par l’artiste numérique qui, à partir de toiles mises en correspondance avec la musique, pénètre l’âme du spectateur.
Le spectateur ne peut se poser devant un tableau et méditer à son rythme. Il est pris par la main, bousculé, pénétré par la sensation du beau. Il n’a pas besoin d’un silence recueilli ; les hurlements des gosses excités par ce bouillonnement de sensations le gênent à peine.
L’art numérique ouvre un nouveau territoire. Il ne rend pas caduc le musée des beaux-arts. Ce qu’il propose est quelque chose d’inédit. L’essayer vaut vraiment la peine.
C’est le même principe, semble-t-il, que ce qui est présenté aux Baux de Provence dans les Carrières de Lumière. J’y avais vu une exposition-spectacle sur Chagall. J’y étais entré dubitatif et en suis sorti conquis.