La vaccination contre le Covid de Mauricette M dans un hôpital de la Seine Saint-Denis le 27 décembre a été retransmise en direct par les chaînes d’information continue, puis en soirée par les journaux télévisés comme s’il s’agissait d’un acte d’héroïsme.
On a beaucoup et justement critiqué l’impréparation logistique de la campagne de vaccination en France. Or, le diable se loge dans les détails : si les vaccins ne sont pas acheminés en temps et en heure, les plus belles stratégies tournent au fiasco.
La communication sur cette campagne s’est avérée désastreuse. Il est vrai que l’enjeu est de taille : selon un sondage Odoxa Backbone publié le 3 janvier, 58% des Français ne veulent pas se faire vacciner contre le Covid19. Le pays de Louis Pasteur figure parmi les pays les plus réfractaires à la vaccination.
La réponse gouvernementale a consisté à apporter la preuve que toutes les précautions étaient prises. Le vaccin ne sera pas obligatoire. Le consentement sera requis, si possible par écrit. Un « comité citoyen » de 35 personnes tirées au sort veillera à la sécurité et à la transparence du processus.
Patrick Lagadec, spécialiste de la gestion des crises, observait récemment sur Twitter : « pour le moment, on est plutôt parti de l’idée qu’on n’autorisera les décollages d’avions que lorsqu’il n’y aura plus personne à clamer que la Terre est plate ».
Le problème est que, pour les antivaccins convaincus, toutes ces tentatives pour calmer le jeu renforcent leurs craintes. Ils et elles pensent que si tant de précautions sont prises, c’est que le danger est mortel et que les autorités politiques, associées aux lobbys pharmaceutiques, en cachent la réalité.
La publicité autour de la vaccination de Mauricette M a ainsi eu un effet boomerang. « Une petite phrase prononcée par la septuagénaire, lit-on dans le site Internet de la chaîne LCI, a fait tiquer de nombreux téléspectateurs. Au moment où l’infirmière s’apprêtait à la vacciner, Mauricette M. a semblé dire : « Ah, il faut faire un vaccin ? » » Et certains commentateurs d’en conclure qu’un abus de faiblesse avait été commis : loin d’être une héroïne, elle aurait été conduite à la vaccination malgré elle comme à l’abattoir.
Comme souvent, la démarche du haut (ceux qui savent) vers le bas (les ignares) ne fonctionne pas et se révèle contreproductive. C’est une démarche de bas en haut qu’il faut instaurer : permettre au plus grand nombre possible de personnes convaincues de se faire vacciner. Celles qui ne le sont pas observeront avec curiosité les réactions post-vaccinales (le plus souvent inexistantes ou vénielles) et l’efficacité du vaccin. Beaucoup, finalement, choisiront le vaccin, pour eux-mêmes et par altruisme.
Cette année, j’ai dû me placer sur une liste d’attente pour bénéficier du vaccin contre la grippe. Lorsque mon tour viendra, je recevrai avec reconnaissance le vaccin contre le Covid19. Et je ne me considère pas comme un héros.