Le chaos sonore de la prison

En prison, on ne peut échapper au bruit. C’est même une caractéristique de la vie carcérale, au même titre que l’odeur de transpiration et de produits d’entretien.

 La maison d’arrêt où je rencontre chaque semaine des personnes détenues ayant été déclarée « cluster Covid », les visites sont suspendues. Un de mes camarades visiteurs a eu la bonne idée de nous adresser le lien avec une émission d’Arte Radio, « au cas où la prison nous manquerait ».

 Réalisé en 2009 par Jean-Baptiste Fribourg, ce montage sonore d’une durée de 5’43 est le produit d’un atelier réalisé en maison d’arrêt. Il a pour titre « son de prison, le chaos sonore de la prison ». Il mêle des bruits enregistrés dans les coursives et des témoignages d’hommes détenus, qui expliquent combien le vacarme permanent ronge leur vie quotidienne.

Le visiteur est en effet immédiatement saisi par le choc des sons entremêlés.

 Les portes qui claquent, qui grincent. Le cliquetis des serrures.

 Les ordres donnés par haut-parleur. Les conversations des surveillants par interphones. Un détenu tambourine sur la porte pour se faire entendre, ou dans une crise de désespoir. Un surveillant apostrophe un détenu, ou l’inverse.

 Le départ en promenade, les conversations. Un match de foot, dans la cour.

 Les postes de télévision, avec le son à fond dans les cellules. Une finale de championnat, les vivats lorsqu’un but est marqué.

 Les dialogues hurlés d’une fenêtre grillagée à l’autre, souvent éloignées l’une de l’autre, accompagnant le « yoyo » qui livre de la marchandise.

 Les cantiques du culte protestant, le samedi matin. La musique d’un atelier de danse.

 L’écho d’un bout de coursive à l’autre, d’un étage à l’autre. Le silence absent, comme le chant des oiseaux ou le frémissement du vent dans les branches s’un arbre, de l’autre côté de la rue, si proche, si lointain.

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