Le bruit des trousseaux, le film

France 2 a récemment diffusé le téléfilm « le bruit des trousseaux » réalisé par Philippe Claudel et adapté de son roman éponyme paru en 2002.

 L’écrivain a commencé sa carrière comme professeur de français dans une maison d’arrêt. Dans le film, le jeune professeur, Alexis Pasquier (Cyril Descours), a déjà eu une expérience professionnelle comme gérant de patrimoines, mais il est à la recherche d’un métier qui ait du sens.

 Le film suit ses premières journées, l’apprivoisement avec un milieu clos qui a ses règles explicites et ses codes implicites, avec les surveillants et avec les détenus. Se greffe sur cette expérience l’amour au premier regard avec Léa (Deborah François), qui travaille dans une boutique de soin des ongles, et dont le père a sur la prison des idées répressives bien arrêtées.

Peu à peu, Alexis fait son bonhomme de chemin. Il apprend à s’adapter à ses élèves malgré leur niveau très hétérogène. Il navigue sans heurts entre ses collègues enseignants, parfois réduits au mutisme à force de déceptions, et les surveillants. Mais Léa finit par ressentir la prison comme une rivale qui s’interpose entre son amoureux et elle.

 Un nouvel élève arrive dans le groupe d’Alexis. Kevin, élève de troisième, vit une relation conflictuelle avec sa mère, sans homme à la maison. Il porte en lui haine et violence. Quand il pousse à l’eau un vieux SDF qui ne sait pas nager, sa vie bascule. Le meurtre qu’il a commis lui vaudra des années d’enfermement.

 Mademoiselle Chartier (Diane Rouxel) vit un double enfermement : dans la prison et dans ses addictions. Alexis l’initie à la poésie, l’encourage à écrire. Elle s’en sort peu à peu. Entre elle et Alexis, la fascination est réciproque. Son prénom est Lise. Elle va être libérée, mais la libération ne signifiera pas, pour elle, l’accès à la vraie liberté. Alexis et Léa feront vivre « Lise » d’une autre manière.

Le film met en scène l’un des passages les plus touchants du roman « le bruit des trousseaux » : « Je me souviens de ces deux surveillants accueillant un détenu qui revenait des assises, et qui, sonné par le verdict qui l’avait condamné à dix-huit ans d’emprisonnement, avançait comme un automate. Ils l’entouraient et lui parlaient avec une douceur dont peut-être l’équivalent est à chercher dans celle que l’on trouve chez une mère qui parle à son fils qui pleure. Les deux gardiens murmuraient des choses simples, des mots de réconfort. Ils tutoyaient le détenu et leur tutoiement était alors la plus grande preuve de leur bonté. »

J’ai beaucoup aimé le film de Philippe Claudel. Pour l’essentiel, il recoupe l’expérience que le visiteur de prison que je suis fait avec les personnes détenus comme avec le personnel. J’ai toutefois relevé deux invraisemblances. Le jeune Kevin, âgé d’une quinzaine d’années, n’aurait pas pu se trouver mêlé aux adultes détenus, et aurait été incarcéré au quartier des mineurs. Par ailleurs, la coursive (le couloir sur lequel donnent les cellules) est anormalement calme et silencieuse.

 Normalement, le mouvement y est permanent, les détenus crient aux fenêtres ou frappent aux portes, les postes de télévision fonctionnent au régime maximum. Cela s’explique peut-être par le fait que le tournage a eu lieu à la centrale de Clairvaux, qui est en voie de fermeture, avec un sous-effectif de détenus. Mieux restituer le vacarme de la prison aurait été cohérent avec le titre – « le bruit des trousseaux », mais aurait peut-être distrait l’attention d’un scénario par ailleurs bien mené.

3 réflexions sur « Le bruit des trousseaux, le film »

  1. Film remarquable et dans lequel on trouve, pour l’essentiel, la vie et l’atmosphère carcérales. J’ai ressenti, aussi l’attachement et les relations que l’on peut avoir avec certains détenus. Je pense que, seul un visiteur de prison, peut avoir ce type d’expérience. J’ai beaucoup apprécié ce qui qui était proche du documentaire, pour ces moments touchants et vibrant d’humanité. Pour les invraisemblables, c’est parce que nous nous rendons dans une prison que nous pouvons les déceler. En même temps pour la majorité des gens un film rest

  2. Très bon téléfilm et très bon compte-rendu de celui-ci.
    Peut-être une autre invraisemblance.
    Beaucoup de détenus, dont le jeune Kevin, sont en préventive, en attente de jugement, donc, à priori dans une maison d’arrêt. Des cellules y sont surpeuplées.
    Hors, en maison d’arrêt (pour détention préventive ou courtes peines), pas de cours de français ou autre: seulement en centre de détention ou en centrale, prisons par ailleurs moins surpeuplées.

    1. Merci André. Visitant des personnes détenues en maison d’arrêt, je peux témoigner que « l’école » existe aussi en maison d’arrêt.

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