Chronique d’étonnement n°18

Je souhaite partager dans « transhumances » ce qui m’a étonné, dans ma vie personnelle comme dans l’actualité.

 Dans cet article de transhumances, je m’étonne du silence sur le projet de « Conseil National de la Refondation », alors que la construction d’un consensus démocratique est plus que jamais nécessaire. Et un abime de perplexité s’ouvre sous mes pieds lors d’une visite en prison.

CNR

Je m’étonne que l’on parle si peu du « Conseil National de la Refondation » (CNR) évoqué par Emmanuel Macron avant les élections législatives, alors qu’existe un sérieux risque de paralysie institutionnelle.

Le président avait annoncé le 3 juin son intention d’y inclure les « forces politiques, économiques, sociales, associatives » ainsi que des citoyens tirés au sort, pour réfléchir à des réformes touchant notamment au pouvoir d’achat, à l’écologie, aux institutions et aux retraites.

Cette initiative, prise sans concertation préalable, avait été fraîchement  accueillie. La référence au Général de Gaulle et au Conseil National de la Résistance (CNR) avait été jugée déplacée, voire risible.

Ne serait-il pas opportun de la remettre en chantier sur de nouvelles bases, négociées et consensuelles ? La guerre en Ukraine, l’inflation et la menace de récession, l’urgence climatique ne permettent plus de faire comme si tout pouvait continuer comme avant. Le taux massif d’abstention, particulièrement chez les jeunes, implique de repenser les voies du débat démocratique.

 

Longtemps

À la maison d’arrêt, je patiente depuis un certain temps devant une grille qui m’empêche d’accéder au parloir et de rencontrer la personne détenue que je viens visiter. Une dame arrive, probablement une intervenante extérieure. Elle me demande : « vous attendez depuis longtemps ? »

Un abîme de perplexité s’ouvre sous mes pieds. Instinctivement, je réponds oui, mais je me rends compte de l’ineptie de ma réponse.

Hier soir, au cinéma, ai-je attendu longtemps le début du film ? Tout à l’heure, à l’arrêt d’autobus, ai-je attendu longtemps qu’il se présente ? Le temps n’a pas partout la même valeur, comme si on vérifiait en tout lieu et à tout moment la théorie de la relativité. En prison, il se dilate, il devient mou, une minute équivaut à une année, et les années sont si pleines de vide qu’elles équivalent à un instant.

Dans « Le Visiteur dans et hors les murs », revue de l’ANVP, un psychiatre intervenant en détention raconte l’anecdote suivante. « Je me souviens, alors que je franchissais la succession habituelle de grilles, d’avoir sonné deux fois. Dans l’interphone, j’ai entendu « vous êtes pressé ? Vous allez attendre. » J’ai attendu 10 minutes. Je n’ai jamais su si j’avais effectivement sonné deux fois, c’est ce que je me suis raconté. Pour supporter de se retrouver en position d’objet de jouissance de l’autre, il faut avoir les nerfs solides. »

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