Dans Montedidio (2001), roman dont le nom est celui du quartier populaire de Naples où il a grandi, Erri De Luca fait s’exprimer un adolescent de treize ans qui, en quelques mois, bascule dans l’âge adulte.
L’adolescent vient d’être mis en apprentissage chez Maître Erri, un menuisier du quartier. Il a récupéré chez un fournisseur un rouleau de papier sur lequel il note les faits de sa vie.
Chez lui, on parle le napolitain. « J’écris en italien parce qu’il est muet et que je peux y mettre les faits du jour, reposés du tumulte du napolitain. »
Les événements se précipitent. Sa maman est gravement malade. Il est souvent seul à la maison car son père partage son temps entre son travail et l’hôpital.
Son père lui a offert un boomerang, pas un jouet, un grand secret, dit-il. Sur la terrasse où les femmes pendent leur linge, tout en haut du quartier, il s’entraîne à simuler le lancement afin d’être prêt le Jour J.
Sur la terrasse, il est rejoint par Maria, une fille de son âge. Elle est harcelée et abusée par le propriétaire de l’immeuble, un vieil homme répugnant. Elle initie le jeune garçon à la sexualité, en communiquant d’abord par le regard : « je ne savais pas qu’il était si beau de regarder, de se regarder de près », dit-il. « Me importa de ti », dit-elle : tu comptes pour moi…
Maître Erri héberge Rafanielo, un homme d’une soixantaine d’années qui est arrivé à Naples dans les exodes de la guerre. Son peuple a été englouti dans une catastrophe. Il a le projet de s’envoler pour Jérusalem, « l’unique ville au monde où la mort a honte d’exister ». En attendant, il répare gratuitement les chaussures des pauvres de Montedidio.
Rafanielo s’envolera grâce aux ailes encloses dans la bosse de son dos, lorsque le boomerang lui aura ouvert la voie. Le dernier jour de l’année est le moment : le peuple de Naples fait la fête, chacun échange des vœux de bonheur.
Montedidio est un beau livre, dans lequel la vie du petit peuple de Naples est racontée avec simplicité, émotion, poésie, dans un monde réel et onirique.