Caravage

Réalisé par Michele Placido, « Caravage » raconte la vie turbulente de Michelangelo Merisi, dit Le Caravage (1571 – 1610) et la manière dont elle a modelé sa peinture.

 Dans sa version italienne, le film a pour titre « l’ombre de Caravage ». Il met en effet aux prises Merisi lui-même (Riccardo Scamarcio) et son ombre, un agent du pape (Louis Garrel) chargé d’instruire le dossier du peintre.

 Caravage a en effet été condamné à mort par le pape pour avoir assassiné un rival. Il s’est réfugié à Naples chez l’une de ses plus ferventes admiratrices, la Marquise Costanza Colonna (Isabelle Huppert). Il a demandé sa grâce au souverain pontife. Ce n’est pas seulement sa vie qui est en jeu, mais l’avenir de son œuvre : ses tableaux religieux ont-ils leur place dans les églises ?

Caravage est hanté par le souci de la réalité. Marie-Madeleine ne peut être qu’une femme exerçant la prostitution. Le modèle de Saint Pierre crucifié est un mendiant ivrogne. La Vierge Marie sur son lit de mort est peinte d’après une femme suicidée – ou assassinée – noyée dans le Tibre.

 Les cardinaux et l’aristocratie romaine sont divisés. Certains sont fascinés par la puissance de l’œuvre de l’artiste. Sa vie dissolue ne les gêne pas vraiment : dans le secret des palais, les orgies ne sont pas rares.

 Pour l’Ombre, la recherche de la vérité est insupportable. C’est à l’Église de dire ce que les fidèles doivent penser, et non aux artistes d’imposer leur vision. Où ira-t-on s’ils se mettent à prendre l’Évangile au pied de la lettre, et à croire que le Royaume des Cieux appartient aux gueux et aux prostituées ?

 Le film de Michele Placido fait pénétrer le spectateur dans un monde violent. Les assassinats ne sont pas rares, la torture pour soutirer des aveux est fréquente, des femmes sont soumises au fouet. L’œuvre du Caravage reflète cette violence dans ses jeux de lumière et d’ombre.

 L’opposition entre deux visions de l’Église m’a fait me souvenir de Michel Clévenot (1932 – 1993). Dans « les hommes de la fraternité » et « l’Évangile d’Anatole », il ne cessait de présenter Jésus et ses disciples dans l’histoire comme des amis des petites gens, n’hésitant pas à se salir et à se battre à leurs côtés, à l’opposé de l’idéal de pureté que représente, dans le film de Placido, l’Ombre du Caravage.

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