Dans Babylon, Damien Chazelle plonge le spectateur dans le Hollywood des années 1920, lorsque l’industrie du cinéma, déjà en pleine explosion, subit la déflagration de la technologie du parlant.
Une fête orgiaque est organisée par un magnat du cinéma. Un jeune Mexicain, Manny Torres (Diego Calva) a été chargé du transport du clou de la soirée, un éléphant en chair, en os et en poids. Il aide Nellie LaRoy (Margot Robbie) à s’infiltrer dans la fête.
Manny rêve de travailler sur le tournage d’un film, de participer à la magie du cinéma. Bien qu’elle n’ait tourné aucun film, Nellie se voit comme une star. Elle profite de la fête pour se faire embaucher en remplacement d’une actrice morte de surdose.
Nellie a une énergie folle. Elle s’impose comme la coqueluche des producteurs et réalisateurs. Quant à Manny, il devient l’assistant personnel de la star absolue, Jack Conrad (Brad Pitt). De coups de chance en conseils pertinents, il émerge comme l’une des personnalités en vue de l’industrie cinématographique.
L’arrivée du cinéma parlant précipite aux enfers les stars du muet. La voix de Nellie est grinçante. Le jeu d’acteur de Jack apparaît soudain désuet, et même proprement ridicule. L’un et l’autre glissent de la lumière des projecteurs à la nuit, ils quittent ce monde qui les avait faits dieux.
« Babylon » dure trois heures, mais on ne voit pas le temps passer, tant on se trouve bousculé par l’avalanche d’images superbes et par la musique de jazz omniprésente. On passe par toutes les émotions. La répugnance : vomi, urine, rats dévorés à pleine bouche. L’humour : la production déclare décédé d’une mort naturelle un figurant traversé par une lance lors d’une scène de bataille ; le tournage d’un premier film sonore tourne à la crise de nerfs générale.
Il y a aussi la tristesse. On demande à Nellie pourquoi les larmes lui viennent si facilement ; « il me suffit de penser à mon enfance », dit-elle. La journaliste Elinor St John (Jean Smart) annonce à Jack Conrad que sa carrière est irrémédiablement finie.
Les personnages secondaires ont une véritable consistance, de la chanteuse Lady Fai Zhu (Li Jun Li) au trompettiste Sidney Palmer (Jovan Adepo). Le spectateur est sans cesse bousculé, ballotté d’un excès à l’autre. « Babylon » est un merveilleux hymne au cinéma et à son pouvoir de transporter dans un autre monde.