Les débuts

Dans « Les débuts, par où recommencer ? » (Autrement, 2023), la philosophe Claire Marin se demande ce qu’est un début dans la vie, et comment se remettre en marche après une catastrophe, quand tout semble perdu.

 Claire Marin s’appuie sur les travaux de philosophes tels que Baruch Spinoza, Henri Bergson ou Maurice Merleau-Ponty. Elle s’inspire aussi de poètes comme René Char ou Mahmoud Darwich, de romancières et romanciers comme Annie Ernaux, Brigitte Giraud, Romain Gary ou Italo Calvino.

 D’Italo Calvino, l’autrice retient l’ouvrage intitulé « Si par un jour d’hiver un voyageur », un roman fait de débuts de romans, une sorte d’allégorie de la vie elle-même, faite de commencements.

À la suite du philosophe Tristan Garcia, Claire Marin réfléchit sur le désir de vie intense. « On est à l’affût de ce qui produira en nous ce sentiment puissant de grand éveil, d’expansion ou de dilatation de notre être, selon l’expression de Spinoza. »

 Elle relate une expérience qui fait écho à celle que je vis avec mes petits-enfants. « La toute petite fille – a-t-elle déjà un an ? – est allongée dans son transat quand elle se met soudain à parler une langue inconnue. Pendant un long moment, elle déroule sérieusement un discours qu’on ne comprend pas, mais dont on saisit l’intensité à son implication. Elle s’adresse à nous, concentrée, elle a quelque chose à nous dire. Spontanément, nous nous taisons pour lui laisser la parole. »

 L’expérience d’un nouvel amour est présente dans plusieurs chapitres du livre de Claire Marin, emblématique d’un commencement qui emporte tout sur son passage. « Fait-on seulement l’expérience des commencements de l’amour ? Pour celui qui est vraiment amoureux, le début est en effet toujours raté, parce qu’il a été « ravi », absent à lui-même. »

 Comment recommencer, lorsqu’on est atterré par un deuil, un échec, une rupture ? Comment ne pas se laisser décourager collectivement quand notre époque laisse peu de place à l’espoir ? « La nausée n’est plus causée par la matérialité du monde mais par son effritement, par le délitement d’institutions nécessaires – l’école, l’hôpital, la justice. Le malaise s’accroît aussi, devant nos servitudes consenties aux machines, notre passivité face aux logiques économiques et algorithmiques. »

 « Autant que nous le pouvons, nous luttons contre la passivité pour préserver notre dignité », répond Claire Marin. « La joie est encore possible dans la conscience du tragique, de notre vie personnelle ou de l’époque. On peut penser la légèreté dans la lucidité ». Elle parle « d’obstination dans la joie ».

Claire Marin
Claire Marin

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