Le Musée d’art moderne de Paris propose jusqu’au 21 janvier 2024 une exposition consacrée au peintre Nicolas de Staël (1914 – 1955).
L’exposition est organisée sur une base strictement chronologique. Né dans une famille aristocratique de Saint Pétersbourg, le jeune Nicolas émigra avec sa famille en Pologne à l’âge de cinq ans pour fuir la révolution bolchevique et se trouva alors orphelin.
Anne de Staël, fille du peintre, parle de « cette origine, cette vie de quelqu’un qui perd tout et reste seul au monde. Il s’est construit sur quelque chose de très dur. Il n’avait vraiment plus rien, ni langue, ni parents » C’est pour cela, selon elle que son père « vivait dans un autre temps : un temps tellement pressé, une urgence (…) Mon père, rien ne lui avait permis de se reposer. »
C’est cette approche fiévreuse du monde qui se dégage de l’exposition. Dans la première salle, on suit l’artiste âgé de 22 ans, tout juste sorti de l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles en voyage au Maroc, où il rencontre sa première compagne ; dans l’avant-dernière salle, il a 39 ans, et c’est en Sicile qu’il trouve l’inspiration pour les tableaux qu’il réalise en atelier.
Rien ne semble relier les premières œuvres, sombres et résolument abstraites, et celles qui ont fait sa célébrité, semi-figuratives, éclatantes de lumière. Le lien, c’est l’innovation permanente sans se soucier des modes, la volonté de ne pas se laisser enfermer, de bouger.
J’ai choisi deux images pour illustrer cet article : un hommage de Nicolas de Staël à Piranèse (Giovanni Battista Pironesi), qui publia en 1750 et 1761 un recueil de gravures intitulées « les prison imaginaires ». Cette toile de 1948 illustre bien le chaos dans lequel se trouvent soumises les personnes détenues.
L’autre image, placée en exergue de cet article de « transhumances », est une toile de 1952 intitulée Gentilly. J’ai vécu quelques années dans cette commune limitrophe de Paris. La vision de Staël, probablement inspirée des bords de la Bièvre aujourd’hui couverte, suscite mon étonnement.
L’exposition « Nicolas de Staël » constitue une excellente introduction au destin personnel et artistique de ce personnage génial et romanesque, passionné par la vie jusqu’à se suicider. Les gardiens procèdent sans ménagement à l’évacuation du public dix minutes avant l’heure de fermeture. Il est conseillé de réserver un créneau horaire permettant au moins deux heures de visite.