Le deuxième acte

Dans « Le deuxième acte », Quentin Dupieux propose une comédie noire dans laquelle les acteurs se trouvent sur le fil du rasoir entre le rôle qu’ils jouent et leur vraie personnalité.

 La dernière séquence consiste en un travelling de plusieurs kilomètres et plusieurs minutes. Ce sont les rails supportant la plateforme technique qui sont filmés. « Le deuxième acte » est donc un film sur le travelling. Les acteurs sont contraints par le chemin de fer (la « storytelling ») que le réalisateur leur impose.

 Cette contrainte est d’autant plus forte que le réalisateur du tournage dont celui de Dupieux est le miroir, est, pour la première fois, une intelligence artificielle. En fin de journée, un personnage fictif sur écran vient féliciter ou rabrouer les acteurs sur le seul critère de leur fidélité au script. Leur cachet est amputé du pourcentage d’erreurs relevé.

Premier travelling. David (Louis Garrel) explique à son ami Willy (Raphaël Quenard) ce qu’il attend de lui : séduire la belle Florence Drucker (Léa Seydoux), qui le poursuit de ses assiduités mais qu’il est incapable d’aimer. Le dialogue entre David et Willy déraille plusieurs fois du scénario écrit.

 Deuxième travelling. Florence et son père Guillaume (Vincent Lindon) marchent côte à côte. Guillaume est excédé par la nullité du scénario alors que notre monde est en train de s’effondrer. Il prétend quitter le tournage. Florence évoque les musiciens du Titanic qui jouèrent jusqu’au dernier moment.

 Troisième travelling. David explique à Florence sa théorie sur la vie. La fiction est réelle, le réel est fiction. Seul le deuxième acte, l’envers du premier, mérite d’être vécu.

 La majeure partie du film se passe à la table du restaurant nommé « le deuxième acte », au milieu de nulle part. Le serveur, Stéphane (Manuel Guillot), est un figurant si impressionné par sa première apparition au cinéma aux côtés de stars qu’il est saisi de tremblote au moment de servir le Bourgogne. Guillaume, Willy, David et Florence tentent de l’apaiser. Stéphane, traumatisé par cet échec, se suicide… dans le film réalisé par l’IA. Et dans la vraie vie ?

 J’ai beaucoup ri à ce film cruel sur la vie de femmes et d’hommes dont le métier consiste à jouer la comédie. N’est-ce pas aussi le cas de nombreux professionnels qui jouent un rôle mais ont besoin des coulisses pour régler leurs comptes en toute mesquinerie ?

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