Le livre de René Magnon, « Lacanau-Océan a cent ans, 1906 – 2006 » constitue une mine d’information sur l’histoire de cette station créée à partir de rien par de entrepreneurs visionnaires. Le chemin de fer y joua un rôle essentiel.
L’une des premières illustrations du livre présente une carte du Médoc de 1604. On y voit, en contrebas de la dune littorale ancienne et parallèle à la côte, « l’étang doux de Médoc de cinq lieues de long et une de large » (environ 22 km sur 4). Cet espace marécageux, de profondeur variable, inclut ce que sont aujourd’hui les lacs de Carcans – Hourtin et de Lacanau. Des paroisses le bordent. Certaines sont reconnaissables aujourd’hui : Carcans, Lacanau, Le Porge. Hourtin n’est pas mentionné. Taris, Talaris, Cartaignac ne sont plus maintenant que des lieux-dits.
Jusqu’au dix-huitième siècle, c’était une zone de pâturages, où les troupeaux étaient veillés par des bergers souvent montés sur des échasses. La malaria, maladie des paluds (marécages), sévissait. A partir de 1817, l’Etat entreprit un gigantesque programme d’ensemencement de pins maritimes, dont l’objectif était de produire de la résine pour l’industrie chimique et du bois, en particulier des poteaux pour l’industrie minière ; il était aussi de contribuer au bien-être de la population par l’assainissement et la création d’emplois.
Lorsqu’en 1894 un propriétaire de Lacanau, Pierre Ortal, développa le projet de construire sur la dune une station touristique, le projet paraissait insensé. Certes, Soulac et Arcachon attiraient déjà des vacanciers, mais la première était proche de l’estuaire de la Gironde et la seconde sur le Bassin d’Arcachon, deux emplacements logiques. Lacanau n’était « nulle part ». On y accédait à dos de mules par des chemins forestiers. On construisit une ligne de chemin de fer de Lacanau à l’Océan, prolongeant ainsi les lignes qui reliaient déjà Lacanau à Bordeaux, Lesparre et Arès. Elle fut inaugurée en 1906 et ce fut le point de départ de la station. La route, quant à elle, ne fut ouverte que quatre ans plus tard.
Le trajet de Bordeaux à Lacanau Océan par le petit train durait 3 heures. Le convoi se composait de voitures de première, seconde et troisième classes, d’un fourgon avec un compartiment aménagé pour le service de la poste et parfois un wagon à bestiaux, car durant les grandes vacances les chevaux suivaient leurs maîtres. En 1908 furent mises en service seize voitures aux jolies portières arrondies achetées au Metropolitan Railway de Londres. Chaque compartiment s’ouvrait par une porte donnant sur le quai.
Le petit train de Lacanau dépérit peu à peu après la seconde guerre mondiale, supplanté par la route. La fin de l’exploitation fut décidée en 1961. L’emprise de la voie ferrée est maintenant occupée par une piste cyclable départementale qui va jusqu’à Bordeaux.