Posséder un grand nombre de prénoms peut causer un embarras à l’Etat-Civil. Ce peut être aussi le symbole d’une profusion de racines et de vitalité.
A l’occasion du mariage civil de ma fille Florence, le maire s’est amusé de mon grand nombre de prénoms, au point d’en répéter avec gourmandise la litanie : Xavier Gaston Alfred François Raphaël. On remarquera non seulement l’abondance, mais la présence de signes diacritiques, cédille et tréma : bref, une horreur pour l’enregistrement administratif. Depuis l’avènement de l’informatique, ma riche palette ne cesse de me causer des tracas : pas assez d’octets pour caser tous mes qualificatifs, ou des octets trop obtus pour accepter le « ç » et le « ë » !
Et pourtant, quelle richesse que de se trouver ainsi sous la protection tutélaire de parrains, de grands pères, d’oncles, de saints qui ont marqué l’histoire de la famille et s’assurent que le jeune rejeton dispose d’assez de racines pour grandir en arbre puissant ! A moins, comme le disait le philosophe Georges Steiner de son ami Georges Moustaki, de faire partie de ces êtres qui n’ont pas de racines mais des jambes.
J’ai découvert à l’occasion d’une visite au musée Picasso de Malaga l’état-civil du célèbre peintre : Pablo Diego José Francisco de Paula Juan Nepomuceno María de los Remedios Cipriano de la Santísima Trinidad Mártir Patricio Ruiz y Picasso. Mes cinq prénoms semblent misérables à côté du feu d’artifice de « nombres » et « apellidos » de celui qui sera simplement connu sous le prénom de Pablo et le premier nom de famille de sa mère.