« Né quelque part », premier film de Mohamed Hamidi, porte un regard juste sur une famille algérienne que sépare la Méditerranée.
Farid (Tewfik Jallab) est un français, étudiant en droit, dont la petite amie, Audrey, est une jeune avocate française. De l’Algérie, pays de ses parents, il ne sait presque rien. Il comprend l’arabe, pour l’entendre parler dans l’appartement familial, mais il ne le pratique pas lui-même.
A la demande de son père malade, il doit se rendre au bled, dans la région de Tlemcen, pour empêcher l’expropriation de la maison que celui-ci a construite avec les économies de toute une vie. Au village, il fait la connaissance de ses oncles et cousins. Il y a cinquante ans, son père a émigré en France pour ramener de l’argent à la famille ; les autres sont restés. La Méditerranée qui sépare la famille est devenue un gouffre. En région parisienne, les enfants se sont intégrés et ne conservent d’arabe que leurs prénoms ; au bled, ils rêvent d’une vie meilleure, multiplient les demandes de visa et reçoivent invariablement en réponse des regrets de ne pouvoir donner suite.
Farid est accueilli comme un frère par son cousin (joué par Jamel Debbouze). Mais celui-ci usurpe son identité et s’enfuit pour la France. Voilà donc Farid bloqué pour un temps indéterminé dans le village de son père. Il se laisse peu à peu imprégner et séduire par la fraternité qui règne. Le seul téléphone du village est au café, et tous les consommateurs profitent des conversations. « On ne peut pas avoir un moment d’intimité ? », proteste Farid après une conversation animée avec Audrey. Sais-tu comment se dit « intimité » en arabe ?, lui demande Fatah (Fatsah Bouyahmed) – « eh bien ça n’existe pas ! ». Et Farid de rire de bon cœur.
Avec l’aide de l’Imam, Farid parvient à convaincre les habitants menacés d’expropriation de déposer un recours gracieux qui bloquera à coup sûr la procédure. Il se heurte à une administration algérienne tatillonne et méprisante. Mais il se heurte aussi à l’administration française : démuni de papier, il cherche le moyen de franchir la forteresse de Schengen. Il prend la route des clandestins et se retrouve enfermé dans un centre de rétention administrative à Marseille.
La promotion du film s’est faite autour du personnage de Jamel Debbouze, en mettant en avant la comédie et même la farce. Celles-ci existent dans ce film, mais presque seulement dans la première partie. La tonalité est plutôt grave. On y voit le déchirement de familles séparées par les refus de visas, l’aveuglement administratif, la frustration de jeunes sans emploi, le désespoir des clandestins, mais aussi l’émotion de Farid sur la terre de son père et sa fascination devant la belle Samira. Son père aurait aimé qu’il épouse Samira. Mais c’est Audrey que Farid retrouve au terme de son Odyssée.