« Copie Conforme », le dernier film du réalisateur iranien Abbas Kiorastami, nous propose un fascinant portrait de femme.
Dans une petite ville de Toscane, un critique d’art (joué par le chanteur d’opéra William Shimell) donne une conférence sur son dernier livre consacré à la valeur des reproductions. Au premier rang, une femme (Juliette Binoche) semble boire ses paroles ; comme le dira son jeune fils, elle est fascinée par l’orateur. Elle l’invite à passer ensemble l’après-midi. Il y a tant de réserve et de distance entre eux, elle semble si écartelée entre le désir de la rencontre et la timidité, qu’on croit qu’ils viennent de faire connaissance.
En réalité, ils sont maris et femme depuis quinze ans, mais elle élève seule leur fils. Elle tente de faire sa reconquête. Elle l’entraîne dans le village où ils ont passé leur nuit de noce, près d’un sanctuaire censé porter chance aux dizaines de couples qui viennent s’y faire photographier et reproduisent ainsi le modèle originel du mariage parfait. Désespérant de retrouver un homme sur l’épaule de qui reposer sa tête, elle se maquille et met ses plus belles boucles d’oreille et le supplie de la regarder.
L’homme finit par lui déclarer qu’elle est plus belle aujourd’hui qu’au jour de leurs noces, mais le malentendu est insurmontable. Il n’est pas possible de remonter le temps, de remonter de la copie à l’original et de l’original au modèle. Le film laisse un profond sentiment de frustration et de tristesse, mais cette profondeur abyssale fait la beauté de l’œuvre cinématographique.
Juliette Binoche a reçu pour ce rôle la palme de la meilleure actrice au Festival de Cannes. « Quand mon personnage lui parlait comme s’il était son mari, je parlais à William exactement comme s’il était mon mari », dit Juliette. « Alors que nous travaillions ensemble, nos rythmes discordants tombaient bien et nous n’avons jamais essayé de briser ce rythme. Jouer, c’est comme peler un oignon, vous devez retirer chaque couche pour en révéler une autre ». Elle dit aussi « je n’ai pas le sentiment d’avoir des racines. Les racines que je peux avoir sont plus à l’intérieur de moi que là où je vis ». Et encore : « Mon but a toujours été d’avoir des expériences humaines dans mon travail ».
Photo du film « Copie Conforme ».