Arte TV a récemment diffusé un passionnant documentaire de Xavier Deleu et Yonathan Kellermann intitulé « Sports : le revers de la médaille ».
C’est sans enthousiasme que je me suis mis devant mon téléviseur. Je croyais tout savoir sur l’ampleur du dopage dans toutes les disciplines sportives. Ce documentaire a mis des visages sur cette plaie : celui Maurizio Vasino, footballeur italien atteint de sclérose en plaques ; celui de la joueuse de tennis Marion Bartoli qui raconte les souffrances sans cesse infligées à son corps ; celui de Julia Gottschalk, nageuse d’Allemagne de l’Est gavée de médicaments qui a donné naissance à une fille à moitié aveugle ; ou encore, celui du joueur de football américain Kyle Turley, atteint d’une maladie neurodégénérative et en proie à de violentes crises de dépression.
Le documentaire donne la parole à des médecins et des chercheurs, qui expliquent le lien entre des chocs cérébraux (celui du footballeur qui renvoie la balle de la tête ou celui d’un rugbyman violemment plaqué) et des problèmes neurologiques pouvant eux-mêmes entraîner une mort prématurée.
Il souligne le dérapage du « sport » au « business sportif ». Citons la note de présentation publiée par Arte : « Pesant désormais 3 % du commerce mondial, à l’égal des secteurs du textile ou de l’automobile, le sport de haut niveau est en effet entré, depuis trois décennies, dans l’ère du marché. Conséquences fréquentes : recours au dopage presque systématique, surmédicalisation constante, accélération des rythmes d’entraînement, réduction des temps de récupération ou de repos après blessure, obsession du record… »
Cette fuite en avant donne le vertige. J’ai moi-même exprimé récemment dans « transhumances » mon admiration pour ces gladiateurs modernes qu’étaient les footballeurs engagés dans la Coupe d’Europe. Le documentaire nous révèle le revers de la médaille. Il est possible que leurs exploits soient sans commune mesure avec les capacités du corps humain ; qu’ils soient fabriqués par des équipes de médecins et de pharmaciens sans cesse en avance sur les contrôles ; que la perspective de gains fabuleux favorise le déni des risques.
Il semble difficile de sortir de cet engrenage fatal. Peut-être faudra-t-il un jour organiser une grève massive des fans de foot désertant les stades et des badauds du Tour de France s’absentant du bord des routes ?
