« Transhumances » a récemment évoqué le lucratif business des passeurs en Afghanistan. Dans The Observer du 29 janvier, Caroline Brothers évoque les incroyables histoires d’enfants afghans qui ont traversé l’Europe à pied à la recherche d’une vie meilleure. Elle vient de publier chez Bloomsbury Hinterland, un roman sur les garçons afghans en Europe.
« Derrière les barreaux de sécurité d’une pièce spartiate, carrelée de blanc, 25 jeunes disposent des rouleaux de tapis de sol. Les travailleurs de nuit de l’Armée du Salut, qui s’occupent de ces adolescents étrangers solitaires dans un abri dans un coin moche de Paris, distribuent des draps et des sacs de couchage ; il ya a deux garçons du Mali et un contingent du Bangladesh ; le reste a voyagé par voie terrestre, en utilisant toutes les méthodes imaginables, depuis l’Afghanistan.
Les plus jeunes ont 13 ans, minuscules cousins de Kaboul arrivés ce matin là après un voyage de cinq mois. Ils retirent leurs baskets et les mettent au pied de leur tapis de sol. L’un d’entre eux, Morteza, retire précautionneusement ses chaussettes. Le dessous de ses orteils est complètement blanc.
Je demande ce qu’il est arrivé à ses pieds. « Eau », dit-il. Marchait-il dans l’eau ? Mohammed, le garçon du tapis de sol voisin, qui connait plus d’anglais, traduit. « Dans les montagnes », dit-il. Quelles montagnes, je demande, pensant à la chaine qui forme la frontière entre la Turquie et l’Iran. « Croatie, Slovénie, Italie », dit Morteza. Mohammed intervient. « Pas de l’eau », clarifie-t-il. « De la neige ».
Soudain je comprends. Les pieds de Morteza ne sont pas détrempés ou couverts d’ampoules. Il a claudiqué à travers l’Europe avec des engelures. »
L’enquête de Caroline Brothers a notamment pour cadre la maison du jeune réfugié de France Terre d’Asile. N’est-ce pas une chance pour notre pays d’accueillir des jeunes dotés d’une telle rage de vivre ?
Photo « The Observer » : Morteza à Paris au bout de son voyage à pied par les montagnes d’Europe.