Dans Anora, Palme d’or au Festival de Cannes 2024, le réalisateur Sean Baker raconte l’illusion de pouvoir dépasser les barrières de classe, et la douloureuse désillusion.
Ani (Mikey Madison) exerce le métier de strip-teaseuse dans une boîte de Brooklyn. La première partie du film la montre au travail : on excite les clients, on les approche, on les amène dans une cabine privée. La technique du travelling met en évidence une caractéristique de métier de travailleuse du sexe : le travail à la chaîne.
Le soir, Ani revient dans sa colocation dans une banlieue sordide secouée par le vacarme d’un métro aérien. Mais un jour, tout semble lui sourire. Parce qu’elle parle russe, on lui confie un client, Ivan (Mark Eydelshteyn). Il est le fils d’un oligarque, dépense sans compter, habite un appartement d’un luxe inouï. Il contracte Ami pour une semaine de compagnonnage sexuel exclusif. Elle lui plait, par son corps et sa personnalité.
Quand Ivan perçoit qu’épouser Ami pourrait lui valoir la citoyenneté américaine et l’exempter du retour à Moscou pour épauler son père dans ses affaires, il lui propose le mariage. Pour Ami, c’est un rêve impensable : devenir riche, se transformer en princesse. Ivan – Vania – lui plait : beau garçon, drôle, fêtard.
Galina (Darya Ekamasova), la mère d’Ivan, lance une équipe d’hommes de main à la recherche d’Ivan et Ami pour faire annuler ce mariage qui entache la réputation de la famille et ramener Ivan à Moscou. Il y a Toros (Karren Karagulian), pope orthodoxe qui veille aux intérêts de la famille à New-York et deux costauds, Garnik (Vache Tovmasyan) et Igor (Yura Borisov). Ils n’y vont pas de main morte pour venir à bout de la résistance forcenée d’Ani, qui défend son rêve de princesse avec les dents.
Ivan s’enfuit. Une course éperdue s’engage de bar en club pour le retrouver. Peu à peu, Ani doit accepter la réalité. Ivan n’est qu’un fils à papa, il vit sous l’emprise de sa mère, il reviendra à Moscou, il la trahit. Igor, l’un des tortionnaires d’Ani, se découvre amoureux d’elle. Il l’appelle par son véritable prénom : Anora. Que décidera-t-elle en réponse à la perspective d’une vie de couple dans un contexte décidément prolétarien ?