Inspiré d’un roman de Joseph Kessel, le film « Belle de Jour » a été réalisé par Luís Buñuel en 1967. Il a été récemment diffusé par Arte TV.
Séverine Sérizy (Catherine Deneuve) est une jeune bourgeoise qui a fait un an auparavant ce qu’il convient d’appeler un beau mariage avec un Pierre (Jean Sorel), un jeune chirurgien beau, riche et gentil. Elle aime la présence de cet homme bien sous tous rapports. Mais physiquement, elle n’est pas attirée par lui. Sa vie dérive dans l’ennui.
Henri Husson (Michel Piccoli), un ami de Pierre, play-boy affiché et assumé, la poursuit de ses assiduités. Mais commettre avec lui l’adultère constituerait une trahison. Il reste que le libertin a ouvert une brèche dans la conscience frustrée et triste de Séverine. Il lui a glissé une adresse : celle de Mme Anaïs, tenancière d’une maison de passe de luxe où officient trois demoiselles. Séverine se rend chez Mme Anaïs la peur au ventre, mais aussi, plus forte que la peur, la curiosité et l’envie de briser un tabou. Elle est engagée sous le nom de Belle de Jour, puisque son service finit impérativement à 17h.
C’est une véritable libération que provoque en Séverine l’assouvissement de ses fantasmes et l’épuisement de ses frustrations. Elle deviendrait presque sexuellement éprise de son mari si un malfrat devenu son client ne s’était juré d’éliminer cet obstacle dressé entre lui et sa proie.
L’ombre du groupe surréaliste, dont Buñuel fit partie avant-guerre, plane sur le film. Au terme d’une paisible promenade en landau attelé avec son tendre mai, Séverine est, sur son ordre, violemment expulsée du véhicule, attachée à un arbre, fouettée et abusée. À un autre moment, Séverine reçoit sur le visage des paquets de boue. Vers la fin du film, Pierre, devenu infirme, se relève comme par miracle pour reprendre la vie d’autrefois.
Le rêve et le cauchemar rendent présente la charge de violence du désir mâle et du désir femelle corsetés dans la société bourgeoise. Il est probable que, filmé aujourd’hui, le sujet aurait été montré avec du nu, du sang et des coups. Le second degré dans l’érotisme explique peut-être l’attrait que continue de susciter le film de Buñuel, un demi-siècle plus tard.