Captain Fantastic

Arte TV a récemment diffusé « Captain Fantastic », film de Matt Ross (2016) avec Viggo Mortensen dans le rôle principal.

 Ben Cash (Viggo Mortensen) vit avec ses six enfants âgés de 18 à 5 ans en quasi-autosubsistance au fond d’une immense forêt du nord-ouest des États-Unis. Ben et son épouse Leslie leur ont fabriqué des prénoms pour qu’ils ne ressemblent à personne d’autre sur terre : Bo, Kelyr, Vespyr, Relian, Zajer et Nai.

 Leur éducation vise à en faire des adultes exceptionnels à tout point de vue. Ils apprennent à chasser et dépecer du gros gibier, à se guider avec les étoiles, à se battre au corps à corps, à tirer à l’arc, à escalader des falaises à pic. Ils rendent compte à leur père de leur programme de lecture et exposent à leurs frères et sœurs leur opinion personnelle sur ce qu’ils ont lu. Ils jouent tous d’un instrument, et pendant les soirées au clair de lune on chante et on danse.

Cette communauté qui semble idéale est travaillée par des forces centrifuges. L’aîné, Bo, projette d’étudier à Harvard et est si brillant qu’il y est admis. Relian, le quatrième enfant, rêve d’une vie normale où l’on fêterait Noël au lieu de l’anniversaire du linguiste progressiste Noam Chomsky. Mais surtout, Leslie, la maman, est hospitalisée. La vérité est un principe cardinal de l’éducation dans la famille Cash. Ben énonce cette vérité : Leslie était soignée pour sa bipolarité, elle s’est suicidée en s’ouvrant les veines.

 Jack (Franck Langella), le père de Leslie, interdit à Ben de participer aux funérailles : c’est lui qui, avec son utopie irréaliste, serait responsable de la mort de sa fille. Mais les enfants ne l’entendent pas de cette oreille. Ben se met au volant d’un vieil autobus transformé en camping-car. Ils parcourent 2 500km, logent chez le frère de Ben et la coexistence avec ses deux fils accrocs à la malbouffe et aux écrans est rugueuse. Bo tombe amoureux d’une fille rencontrée dans un camping, mais la vie autarcique en forêt ne l’y a pas préparé.

Ben et les enfants arrivent à temps pour les funérailles de Leslie, un enterrement chrétien au lieu du bûcher bouddhiste qu’elle avait souhaité. Les événements se bousculent : Relian souhaite vivre auprès de ses grands-parents. Ceux-ci sont prêts à accueillir toute la famille dans leur grande maison si Ben et les enfants abandonnent leurs folles idées.

 Ben acceptera-t-il la défaite de son projet de contresociété égalitaire et non marchande ? Un compromis est-il possible ?

 « Captain Fantastic » est un film passionnant. Le réalisateur observe, ne juge pas. Dans le rôle de Ben, Viggo Mortensen fait ressentir l’ambigüité du personnage. D’un côté, il pourrait verser dans la tyrannie et la manipulation. De l’autre, il ne cache pas ses fragilités et ses chagrins, et il accepte, même à regret, que ses enfants ne partagent pas sa philosophie de la vie. Quant à Jack, le père de Leslie, bourgeois traditionnaliste, il n’est pas le salaud qu’on pourrait attendre, mais un grand-père préoccupé par l’avenir de ses petits-enfants.

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