La Bibliothèque Nationale britannique, British Library, est l’une des plus importantes au monde.
La British Library occupe un bâtiment ultramoderne près de la gare de St Pancras, construit en 1997. C’est l’une des toute premières bibliothèques au monde. Elle conserve 14 millions de livres et gère 3 millions d’entrées nouvelles chaque année, qui occupent près de 10km de rayonnage.
La Bibliothèque présente une somptueuse collection permanente, dont l’accès est gratuit. On y admire des volumes enluminés, des Bibles et des Corans anciens, des cartes géographiques remontant jusqu’au Moyen Âge, des manuscrits de livres qui ont marqué l’histoire. Une salle est consacrée à la Carat Magna de 1215. Au milieu d’un fatras de dispositions organisant la société féodale, la charte contient trois dispositions qui n’ont jamais été abrogées, et notamment le droit d’être jugé en application de la loi, et non de la seule volonté du souverain.
La British Library présente actuellement une exposition intitulée « Writing Britain : Wastelands to Wonderlands », « Ecrire la Grande Bretagne : de la terre souillée à la terre des merveilles ». Elle est organisée par thèmes : les rêves ruraux, les sombres usines sataniques, les endroits sauvages, les faubourgs, Londres, les lacs, rivières, canaux et littoraux. Chaque thème est illustré par des romans ou des poèmes, présentés dans des éditions d’époque ou sous forme de bande enregistrée.
Le sous-titre de l’exposition est une phrase de William Blake (1757 – 1827) : « Jérusalem a-t-elle été construite ici, parmi ces sombres usines sataniques ? » Blake était un personnage hors du commun, poète, peintre, imprimeur, créatif hors pair, il a préfiguré le courant romantique en Grande Bretagne et en Europe.
Le Shard, immeuble de 310 mètres de hauteur sur la rive droite de la Tamise, s’affiche déjà comme un monument emblématique de Londres.
Le Shard (dont le nom signifie éclat de verre) vient d’être inauguré par Hamad bin Jassim bin Jabr Al Thani, premier ministre du Qatar, l’Etat qui en a financé la construction. Le promoteur, Irvine Sellar et l’architecte, Renzo Piano (celui du Centre Georges Pompidou) participaient à l’événement.
L’hebdomadaire culturel « Time Out » souligne que le Shard, une tour de verre de 310 mètres d’altitude, a déjà pris sa place parmi les icônes de la ville de Londres : la tour de Londres, Big Ben, les Maisons du Parlement, la Cathédrale St Paul et, plus récemment, le bâtiment des Lloyds (1986), le théâtre du Globe (1997), le Gherkin (2003) ou encore le stade de Wembley (2007), sans parler encore du ArcelorMittal Orbit, la sculpture monumentale d’Anish Kapoor et Cecil Balmont près du Stade Olympique.
Dans le Sunday Times du 1 juillet, le pittoresque maire de Londres Boris Johnson se réjouit de pouvoir observer les Froggies (mangeurs de grenouille) du sommet du Shard (en réalité, la vue ne porte pas jusqu’à Calais). Il faut dire, souligne l’hebdomadaire conservateur, que le maire de Londres n’aime rien tant que se payer une bonne tranche de « frogbashing » (fête à la grenouille). Il cite un article de Johnson dans un journal l’an dernier : « Il arrive que nous soyons tous prêts à lire comment nos cousins continentaux sont une bande de Strauss-Khans dont la bouche pue l’ail et qui manifestent un intérêt suspect pour le structuralisme et les films sordides. » Dans le même article, il relevait qu’à voir le nombre de Britanniques qui passent leurs vacances en France et s’installent en Dordogne, on mesurait combien ils admiraient et aimaient secrètement les Français.
Le Shard va être multifonctionnel. On y trouvera un hôtel de luxe, des logements, des bureaux et une plateforme d’observation offrant un panorama unique sur la ville. Il est le nouveau symbole d’une ville d’un dynamisme impressionnant.
La ville de Glasgow, comme Manchester ou Birmingham, est née de la révolution industrielle. Son urbanisme en damier et ses édifices victoriens ne sont pas particulièrement esthétiques. Mais la ville tente de se réinventer belle. Elle s’appuie pour cela sur une icône de l’Art Nouveau, Charles Rennie Mackintosh et son épouse Margaret Macdonald.
Il n’y a pas vraiment de quartier ancien à Glasgow. La Cathédrale était certainement au centre de la petite ville moyenâgeuse. C’est aujourd’hui un très beau témoignage de l’art gothique, illuminé de vitraux installés ces dernières années. Mais elle semble toute petite à côté de l’immense hôpital victorien qui la jouxte. Elle est dominée par une colline nécropole à la gloire des commerçants et industriels qui firent la fortune de la ville au dix-neuvième siècle, comme Colin Dunlop, décédé en 1837. Elle est aujourd’hui située à près de 2 km de George Square, qui marque le centre de la ville moderne.
Au nord-ouest de Glasgow, on traverse un quartier très résidentiel puis un joli parc, on passe non loin du Helvingrove Museum et l’on parvient à l’Université. Celle-ci abrite, dans un bâtiment moderne, la Hunterian Art Gallery, actuellement fermée pour réaménagement, à l’exception de la Mackintosh House.
La maison de l’architecte, designer et artiste Charles Rennie Mackintosh (1868 – 1928) et de son épouse Margaret Macdonald Mackintosh (1864 – 1933), artiste et designer, est actuellement accolée à la Hunterian. En réalité, elle se situait du vivant des artistes à quelques centaines de mètres plus loin. Ce que nous voyons aujourd’hui est une reconstruction de certaines pièces dans leurs dimensions d’origine et leur agencement initial, décorées avec du mobilier et selon le design des deux artistes.
La maison est petite, mais chaque pièce constitue un éblouissement. Le salon, blanc avec des touches de couleurs, est inondé de lumière. La salle à manger est plus sombre, meublée avec des chaises de bois obscur dotées d’un dossier tout en hauteur. Des rayures donnent de la profondeur à la chambre à coucher, dont les murs et le plafond sont animés de bandes parallèles. Le spectateur reste saisi par l’harmonie de l’ensemble, la créativité, le sens de la retenue dans une évocation tout en nuances.
Mackintosh et Macdonald sont associés à l’Art Nouveau. Il y a du vrai : certains de leurs posters font penser à Alfons Mucha, certaines de leurs peintures à Gustav Klimt. Mais on est loin de l’effusion végétale de Horta à Bruxelles, Gaudi à Barcelone, ou encore Vallin, Gallé, Majorelle ou Gruber à Nancy. L’esthétique de Mackintosh et Macdonald est plus abstraite, elle se fonde largement sur des formes à angle droit ; elle est aussi plus modeste, laissant de grands espaces vides de décoration, riches seulement d’une peinture à plat soigneusement posée dans un délicat antagonisme ou une subtile complémentarité avec d’autres surfaces.
Plusieurs bâtiments de Glasgow ont été dessinés par Charles Mackintosh avant que la chute des commandes liée à la première guerre mondiale le pousse à la faillite et à l’exil, d’abord à Londres, puis en France à Port Vendres. La Glasgow School of Arts est de ceux-là. Nous n’avons pu visiter l’intérieur, car l’Ecole était occupée par des étudiants en examen. Mais la façade est intéressante par ses proportions harmonieuses et par l’usage, toujours en petite touche, de la ferronnerie, pour animer les volumes.
Dans l’une des salles consacrées à Turner à la Tate Britain, un tableau m’a captivé : Venise vue des marches de l’hôtel Europa, exposé pour la première fois en 1842.
« Venise a sûrement été construite pour être peinte par… Turner », écrivait John Ruskin. On reconnait dans ce tableau de 1842 la Douane de Mer, Saint Georges, et les « zitelle » (La Salute et La Presentazione). Cette image restitue de manière magique l’esprit de la ville de la lagune. Venise est esprit, vapeur, brume. Venise est canal, ondulation, reflets. Venise est opulence, culture, renaissance.
Le tableau de Turner est fortement structuré. Pourtant, on ne discerne pas de rivages. Palais et églises appartiennent au monde de l’air et de la mer, aucune rive ne les sépare. Ce qui structure la représentation, c’est la lumière. C’est bien la Venise que nous connaissons, mais transfigurée en une cité immatérielle, onirique et lumineuse.
Illustration : « The Dogano, San Giorgio, Clitella from the steps of the Europa », Joseph Mallard Turner, 1842.