Aquarelle à la Tate Britain

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A Londres, la Tate Britain propose une magnifique exposition consacrée à l’aquarelle (Watercolour).

« Cette exposition explore ce que l’aquarelle peut produire en termes de technique et d’expression qu’aucun autre moyen ne peut produire, et pourquoi elle est capable de rendre une variété d’effets surprenante, depuis des atmosphères subtiles jusqu’à des couleurs brillantes et translucides », dit le catalogue de l’exposition. Conformément à la vocation du Tate Britain, elle présente exclusivement des œuvres d’artistes britanniques.

L’aquarelle a longtemps eu la réputation d’une technique pauvre : c’était la boite de gouaches que le voyageur emmenait avec lui pour saisir sur le vif des paysages ou des scènes de guerre avant de les reproduire sur la toile ; c’était la technique utilisée par les amateurs, en particulier les femmes d’aristocrates anglais qui en faisaient leur loisir, a défaut de pouvoir peindre à l’huile et en grand format. L’exposition prouve que cette technique a été utilisée par des artistes majeurs, des miniaturistes médiévaux à Turner ou Kapoor, et qu’elle a produit des chefs d’œuvre.

L’exposition est organisée par thèmes, ce qui permet d’associer des œuvres d’époques différentes. Une salle particulièrement intéressante montre l’utilisation de l’aquarelle pour décrire la flore et la faune et disséminer la connaissance.

Elle me permet de découvrir le peintre anglais Edward Burra (1905 – 1976), dont deux tableaux à l’aquarelle sont présentés : une église mexicaine totalement imprégnée de religiosité doloriste et un tableau de 1941 intitulé « soldats à Rye » qui exprime les horreurs de la guerre par, nous dit le catalogue de l’exposition, « une image carnavalesque qui rappelle le Symbolisme et le Surréalisme ». Son style fait penser à celui de son contemporain allemand Max Beckman.

Illustration : église mexicaine, Edward Burra, 1937.

Le Musée Nissim de Camondo

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En bordure du Parc Monceau à Paris, le Musée Nissim de Camondo présente une magnifique collection de meubles, de porcelaine et de tableaux de la seconde moitié du dix-huitième siècle.

L’histoire du musée est celle d’une famille juive d’Istanbul, financiers de l’Empire Ottoman et de l’Unité italienne. Deux frères s’installent à Paris à la fin du second Empire. Moïse de Camondo (1860 – 1935), fils de l’un d’entre eux, collectionne des objets d’art décoratif de la seconde moitié du dix-huitième siècle. Pour abriter ses collections, il fait construire en 1911 un hôtel particulier en bordure du Parc Monceau.

Le fils de Moïse, Nissim, meurt pour la France en 1917 dans un combat aérien. En son souvenir, son père lègue à la République son hôtel particulier et ses collections, pourvu que l’ensemble prenne le nom de Nissim de Camondo. Béatrice, second enfant de Moïse, et ses deux enfants, mourront en déportation.

Le musée est profondément émouvant en raison de la générosité, si mal payée en retour, d’une famille d’Orient pour la France, son pays d’adoption. La fascination qu’exerçait l’âge d’or français, celui des Lumières, sur Moïse de Camondo, un juif sépharade, est touchante, elle aussi. Tout dans l’architecture et l’art décoratif de la seconde moitié du dix-huitième siècle est symétrie, clarté, harmonie. Pourtant, sous l’apparente stabilité et la promesse d’éternité de l’art classique était à l’œuvre la tectonique des plaques sociales et politiques qui allait provoquer le tremblement de terre et le tsunami de la Révolution.

Au second étage, la bibliothèque est une salle elliptique aux parois boisées dont la porte-fenêtre s’ouvre sur un jardin et sur le Parc Monceau. Tout y est intériorité, ouverture d’esprit, sérénité.

Illustration : la bibliothèque du Musée Nissim de Camondo.

Les Préraphaélites au Musée d’Orsay

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Le Musée d’Orsay présente une exposition intitulée : « une ballade d’amour et de mort, photographie préraphaélite en Grande Bretagne, 1848 – 1875 ».

La photographie a été inventée par Daguerre ne 1839. Le mouvement préraphaélite est né en Grande Bretagne, à l’initiative des peintres Millais, Rossetti et Hunt, en 1848. L’exposition du Musée d’Orsay montre les connexions entre une technique, qui allait devenir une forme d’art, et une école de peinture qui prétendait renouer avec la naturalité d’avant Raphaël et l’académisme.

Dans les années 1850, photographes et peintres britanniques partagent une même passion pour le détail des paysages végétaux. Comme les peintres, les premiers photographes mettent en scène des pièces de Shakespeare ou des sonnets de Tennyson.

L’affiche de l’exposition associe un portrait d’une jeune femme, Jane Morris, par son amant Dante Gabriel Rossetti, et une photo prise par John Parsons selon une mise en scène par le peintre.

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On est touché par des photos d’une très belle jeune actrice, Ellen Terry par Charles Dogson, professeur de mathématiques à Oxford et auteur, sous le nom de Lewis Carroll, d’Alice au Pays des Merveilles. Le peintre George Frederic Watts fit plusieurs portraits d’Ellen. A son tour, il fut photographié par Julia Margaret Cameron (1815 – 1879), dont plusieurs clichés sont présentés dans l’exposition. Julia offrit des clichés à Victor Hugo, alors en exil à Guernesey. On sait que l’écrivain français ainsi que son fils Charles s’étaient intéressés très tôt à la photographie.

La personnalité de John Ruskin (1819 – 1900) est très présente dans l’exposition. Critique d’art réputé, Ruskin avait défendu les préraphaélites contre leurs adversaires, en particulier Charles Dickens. Il fut aussi un fervent défenseur de la photographie, qu’il décrivait comme « l’écriture du soleil ». On voit ainsi côte à côte une photographie de la ville de Fribourg, qu’il fit prendre par un de ses assistants, et un tableau de la ville qu’il réalisa lui-même.

Illustrations : Jane Morris, peinte par Rossetti.

Concert Baroque à St Martin-in-the-Fields

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L’église St Martin-in-the-Fields, sur Trafalgar Square à Londres, accueille tout au long de l’année des concerts de musique baroque.

Programmer Vivaldi, Bach, Mozart et Pachelbel n’est pas particulièrement audacieux. On est sûr de trouver un public au-delà du cercle restreint des mélomanes avertis. On pourrait faire la fine bouche si le choix de ce genre de musique ne s’imposait par le lieu.

St Martin-in-the-Fields est l’oeuvre de l’architecte James Gibbs. Elle fut consacrée en 1726. Elle a fait l’objet d’importants travaux de restauration dans les vingt dernières années. L’espace intérieur a été réaménagé pour une plus grande visibilité et une plus grande flexibilité. La voûte décorée de dorures a été remise à neuf. L’éclairage a été soigneusement étudié. On éprouve un sentiment d’harmonie et de plénitude, le même que procure la musique baroque dans le divertissement comme dans la gravité.

Le chef d’œuvre du travail de restauration est la verrière est de l’église, au fond du chœur. Installée en  2008, elle est l’œuvre de l’artiste iranienne Shirazeh Houshiary et de son mari architecte Pip Horne. Au centre du vitrail se trouve un puits de lumière, une ellipse inclinée. Au matin, elle reçoit les rayons du soleil ; la nuit, c’est un volume blanc artificiellement éclairé. Des traits montent de la base du vitrail à l’arc qui le surmonte ; à  proximité du puits de lumière,  ils se tordent de manière à l’éviter et poursuivre leur ascension. Des traits horizontaux structurent ce mouvement vers le haut. Le symbole de la croix est évident : le vitrail est torsion, souffrance, douleur ; il est aussi lumière, action de grâce, résurrection.

La rencontre de l’architecture baroque réinterprétée par des artistes modernes et de musiciens baroques de génie offre une expérience inoubliable.

Photo The Guardian : verrière est de St Martin-in-the-Fields.