Away we go

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 Le film « Away we go » de Sam Mendes a été généralement fraîchement accueilli par les critiques, qui l’ont trouvé fade en comparaison des Noces Rebelles. Mais en raison de son optimisme et de sa bienveillance, il constitue un excellent divertissement pour la période des fêtes.

Burt et Verona sont des intellectuels quelque peu marginaux, « altermondialistes » dit la féroce critique de Télérama. Ils vivent dans une maison isolée et passablement délabrée près de chez les parents de Burt. Lorsqu’ils leur annoncent qu’ils vont avoir la joie d’être grands parents, c’est la douche froide : ceux-ci se préparent en effet à partir pour deux ans en Europe.

De Phoenix à Madison et de Montréal à Miami, de famille en amis, Burt et Verona se mettent à la recherche d’une communauté de vie où ils se sentiront bien, eux et le bébé. Ils vont de déception en déception. Ici, une famille abrutie de l’Amérique profonde ; là, des illuminés qui prétendent vivre une vie d’où conflits et séparations sont absents ; là encore, un couple qui semble mener une vie débordante de générosité mais est dévoré par la frustration de ne pas avoir pu mettre au monde un enfant. Revenus dans leur maison, Burt et Verona la voient avec un autre regard et se disent qu’ils peuvent y être heureux.

Il y a des moments forts dans le film. Dans un hall d’exposition, Verona et sa sœur se glissent dans une baignoire dos à dos ; la sœur de Verona fait mine de lui appliquer un shampooing et elles évoquent des souvenirs d’enfance. Burt et Verona offrent au couple d’illuminés une poussette pour leur petit garçon ; la femme rejette ce cadeau : « j’aime trop mon enfant pour le pousser, pour le repousser devant moi ! » ; il s’ensuit une scène désopilante : Burt transforme la poussette en bolide et le petit garçon en pilote dans le salon de leurs hôtes scandalisés, transformé en circuit de Formule 1. Couchés sur un trampoline au soir couchant, Burt tente d’arracher à Verona la promesse qu’elle l’épousera. Celle-ci s’y refuse, mais ils échangent des promesses vraies ou saugrenues dans lesquelles se scelle un amour qui résistera au temps.

(Photo du film Away we go)

Une seconde naissance

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 Vingt trois ans après que Rom Houben fût déclaré en état de coma végétatif à la suite d’un accident de voiture, un médecin vient de découvrir qu’il était conscient mais empêché de communiquer par le locked-in syndrom.

J’avais été bouleversé par le livre Jean Dominique Bauby, le Scaphandre et le Papillon, dont Julian Schnabel a tiré un film en 2007. Du jour en lendemain, le rédacteur en chef du magazine Elle s’était retrouvé conscient, mais enfermé dans son propre corps par la paralysie de la presque totalité de ses muscles volontaires. A force de volonté, il avait finit par dicter ses mémoires lettre par lettre en cliquant de l’œil à l’énoncé d’un alphabet.

Le cas du jeune Belge Rom Houben, relaté par l’édition du 25 novembre du quotidien anglais The Guardian, est encore plus terrifiant. Bien que ses proches n’aient jamais cru qu’il fût inconscient, il fut diagnostiqué en état de coma végétatif. Pendant vingt trois ans il fut conscient de tout ce qui lui arrivait, y compris de la mort de son père, mais ne put rien partager.

La délivrance vint d’une émission de télévision française sur le locked-in sydrom, qui permit à la sœur de Rom de contacter un spécialiste de l’aide aux paralysés par la médiation de l’ordinateur. Celui-ci repère que Rom bougeait son pied droit. Il mit la souris sous le pied droit et criait : « pousse Rom, Pousse Rom, pousse ». Et il poussa. L’ordinateur dit « je suis Rom ».

Quelques mois plus tard, le Professeur Laureys, de l’Université de Liège, examina Rom avec un scanner perfectionné. Il découvrit que son cerveau était en parfait état de fonctionnement, vingt trois ans après que le garçon eût reçu un diagnostic erroné.

Utilisant un clavier spécial pour l’ordinateur installé à côté de son fauteuil roulant et avec l’aide constante de thérapeutes de la parole et du corps, Rom est maintenant capable de communiquer des choses complexes. « J’étais seulement une conscience et rien d’autre », dit-il à ses médecins. « Je n’oublierai jamais le jour où ils m’ont découvert. C’était ma seconde naissance. »

Le Professeur Laureys pense que 40% des comateux font l’objet d’un diagnostic erroné : les patients sont conscients mais emmurés vivants par le locked-in syndrom. Savoir que tant de personnes vivent un enfer fait frémir. Savoir qu’il existe maintenant un moyen de les diagnostiquer représente un grand espoir.

(Photo du film « Le Scaphandre et le Papillon »)

 

Mille pages de transhumances

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  Plus de mille pages du blog « transhumances » ont été vues depuis son lancement en septembre 2009. Apres deux semaines de vacances, faisons le point !

A bord de l’avion qui m’emmenait pour deux semaines de vacances à l’Ile de La Réunion, j’ai eu l’occasion de visionner le film « Julie et Julia ». Jeune femme mariée arrivant à l’aube de la trentaine, affligée d’un travail stressant dans un call centre, Julie ne sait pas quoi faire de sa vie. Pour se donner un but, elle lance un blog qui racontera jour après jour son défi : réaliser en 365 jours chacune des 525 recettes de cuisine française écrites quarante ans plus tôt par Julia Jones a destination des femmes américaines. Après des débuts déprimants, le blog devient un succès considérable, recevant chaque jour des milliers de visites et des dizaines de commentaires. Il vaut à Julie de démarrer une carrière d’écrivaine.

Le blog « transhumances » n’a pas encore le succès de celui de Julie. Peut-être faudrait-il le focaliser sur un unique un centre d’intérêt pour qu’il devienne dans ce domaine particulier une référence. Mais « transhumances » se veut le reflet de mes passions qui sont multiples. Ce qui accroît la fréquentation, c’est lorsque je fais connaître le blog à un cercle plus large d’amis et de connaissances. Mes articles d’actualité, de Berlusconi à l’Angolate et au soldat Shalit, se perdent dans le vacarme médiatique et n’attirent pas de nouveaux visiteurs.

L’audience du blog est constituée pour une grande part de personnes qui me connaissent, et  dans une moindre mesure par des personnes qui y accèdent en utilisant des moteurs de recherche. Il arrive que certains de ces visiteurs occasionnels connaissent une lourde déception. C’est ainsi que l’un de mes articles contenant incidemment le mot « Decazeville » reçut la visite d’un lecteur cherchant dans cette ville un escort girl.

Le blog reçoit occasionnellement des commentaires, mais pas suffisamment pour amorcer un forum entre lecteurs.

Apres trois mois, il est sans doute trop tôt pour décider de l’orientation future de « transhumances ». Le blog restera dans les semaines à venir un espace d’errance entre des pâturages qui ont pour nom livres, actualité, étonnements, arts, spectacles, rencontres, voyages. A l’horizon de février, j’aimerais que chaque jour au minimum 20 pages soient vues et un commentaire posté. Pour y parvenir, conseils et suggestions de mes lecteurs sont bienvenus !

(Photo du film Julie & Julia)

 

Le ruban blanc

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Le film « le ruban blanc » de Mikael Haneke, Palme d’Or au Festival de Cannes, sort sur les écrans à Londres. Il est fascinant.

Le ruban blanc, symbole de pureté, était celui que l’on attachait au bras des enfants reconnus coupables de péché, et aussi celui qui entravait dans leur lit la nuit les adolescents convaincus de masturbation. Cela se passait en 1913 en Allemagne, dans un village profondément luthérien, dominé par la figure d’un pasteur intransigeant et, naturellement, celle du baron propriétaire d’une grande partie des terres.

Le poids de la religion est écrasant. L’image de Dieu se superpose à des figures paternelles d’un autocratisme terrifiant. Les punitions corporelles sont courantes, les relations sexuelles hors mariage sont impensables, prendre un enfant dans les bras serait faire preuve de faiblesse.

Qui a tendu le fil de fer qui a provoqué la chute de cheval du docteur ? Qui a infligé des sévices au fils du Baron ? Qui a brûlé la grange ? Qui a torturé l’enfant handicapé mental ? Une petite fille prétend avoir des rêves prémonitoires. Que sait-elle ? Qui l’a mise au courant des plans pour accomplir ces vilénies ? La peur et la haine rôdent et accouchent d’actions monstrueuses.

Dans l’enfer, quelques purs survivent, le plus jeune fils du pasteur qui recueille et soigne un oiseau blessé, l’instituteur qui tombe amoureux de la nourrice des enfants du Baron. Tourné en noir et blanc, le film dégage une ambiance accablante. On n’est jamais témoin des horreurs qui se passent. On en est informé indirectement, quelquefois simplement par une rumeur derrière une porte fermée.

Un beau et grand film, vraiment.