Billy Elliott, comédie musicale

La comédie musicale « Billy Elliott » vient de dépasser à Londres les trois millions de spectateurs. Elle se donne aussi à Broadway et à Toronto. C’est un magnifique spectacle.

 « Billy Elliott » a d’abord été un film. Il raconte l’histoire d’un jeune fils de mineur qui, dans le contexte de la grève de 1984 – 1985 contre les fermetures de puits décidés par le gouvernement Thatcher, se découvre une passion pour la danse. Son père et son frère, marqués par le machisme d’un milieu qui exalte la virilité, sont d’autant moins portés à soutenir Billy que la grève devient de jour en jour plus violente et désespérée. Danser, tenter une audition au Royal Ballet, c’est trahir une communauté qui se bat pour sa survie.

 C’est une belle histoire, qui suscite le rire, les larmes, l’émotion artistique. On rit de bon cœur du contraste des caractères et des manières de parler. On est ému par le mur d’incompréhension qui oppose Billy à son père, comme les mineurs aux forces de répression ; par la relation par-delà la tombe entre Billy et sa mère disparue, dont une lettre l’encourage à toujours aller au bout de lui-même ; par la double victoire de Billy, sur son milieu d’origine et sur le monde maniéré du Royal Ballet ; par le Lac des Cygnes dansé en duo par Billy et le danseur étoile qu’il rêve de devenir un jour. On est touché par la beauté de l’art du ballet, alors que le tout jeune Billy découvre la grâce d’un mouvement parfait, elle-même expression de la rage qui l’habite.

 La transposition du film dans l’espace clos d’une scène est parfaitement réussie. Cela est du en partie à une ingénieuse machinerie, mais surtout à une scénographie sans temps mort qui exploite les jeux de lumière et d’ombre et s’appuie sur une musique splendide composée par Elton John.

 Une vingtaine de comédies musicales sont à l’affiche à Londres. Nous avons vu Billy Elliott trois fois, et sommes loin de la lassitude.

 Illustration : affiche de Billy Elliott.

Strictly Gershwin

Le Royal Albert Hall de Londres présente jusqu’au 19 juin une superproduction intitulée « strictly Gershwin ».

 Le spectacle surfe sur la mode de la danse de salon, amplifiée en Grande Bretagne par « Strictly Come Dancing », un concours télévisé qui oppose des personnalités du spectacle ou de la mode qui suivent un entrainement poussé et dont le partenaire est un danseur professionnel. Il joue aussi sur la nostalgie du Hollywood des années trente, le souvenir de Fred Astaire et Ginger Rogers, le charme de l’opérette où dans le bal, les gentils gendarmes côtoient des bonnes sœurs en collerette.

 Il est à l’unisson des images et des sons fondateurs de son public et aurait pu verser dans la facilité. Mais il y a l’extraordinaire musique de George Gershwin (An American in Paris, Rhapsody in Blue, Summertime, Shall we dance…) et le talent des danseurs de l’English National Ballet. Tout est parfaitement orchestré, léger, gai. On passe une excellente soirée.

 Photo : « Strictly Gershwin ».

The Full Monty

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« The Full Monty », l’un des plus grands succès du cinéma britannique (1997) a été mis en scène comme comédie musicale à Broadway en 2000. La Watford Operatic Society vient de le produire au Palace Theatre de Watford.

Le Palace Theatre de Watford, dont certains spectacles attirent un public clairsemé, accueille aujourd’hui la foule des grands jours. Les premiers rangs ont été retirés pour laisser place à une fosse d’orchestre. Les femmes, certaines venues avec un groupe de copines, sont en écrasante majorité. Certaines semblent bien décidées à se rincer l’œil, et l’ambiance est particulière : le public s’identifie aux épouses de ces ouvriers métallurgistes disqualifiés par le chômage et la frontière entre acteurs et spectateurs s’estompe dans l’enthousiasme général.

La comédie musicale transporte l’action de Sheffield (Royaume-Uni) à Buffalo (Etats-Unis) et invente quelques personnages. Le désespoir d’ouvriers devenus « losers » par l’effet d’une oisiveté forcée qui ronge jusqu’à leur dignité, la découverte par des cadres déqualifiés qu’ils sont désormais solidaires de leurs anciens subordonnés, la souffrance des épouses témoin de la déchéance de leur mari, la peur que les travailleurs sociaux retirent la garde des enfants, tout cela est présent dans la comédie musicale comme dans le film, mais celle-ci minimise les sentiments tristes et joue la carte de l’humour et de l’érotisme.

La Watford Operatic Society est une troupe amateur fondée en 1923. Elle produit une comédie musicale chaque année, avec un excellent niveau de qualité. Elle illustre la vitalité de la vie associative musicale en Angleterre.

Illustration : affiche de « The Full Monty » au Watford Palace Theatre.

Tiny Volcanoes

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La pièce de Laurence Wilson, Tiny Volcanoes (minuscules volcans) met en scène les contradictions de la société britannique de l’ère Cameron.

Tiny Volcanoes est produit par la troupe de théâtre itinérante Paines Plough (www.plainesplough.com). Nous avions aimé « Love love love », l’une de leurs productions récemment présentée, comme celle-ci, par le Palace Theatre de Watford.

Tiny Volcanoes, jouée par Michael Ryan et Kevin Harvey, met en scène deux jeunes Britanniques, l’un blanc avec un fort accent populaire du nord, l’autre métis parlant une langue plus soutenue. Le premier est convaincu de la grandeur de l’identité britannique. Le second lui ouvre les yeux sur les minuscules volcans qui, sous la surface, font du pays une potentielle pétaudière : le racisme, le chômage, la déconnexion des élites.

La pièce est difficile à suivre pour un non anglophone : lorsque l’humour et le parler populaire s’en mêlent, les jeux de mots et les références implicites transforment le texte en un sabir indéchiffrable.

Parmi les meilleures scènes, on notera un jeu télévisé dont les participants, représentés par leur effigie, sont des hommes politiques, de Cameron et Clegg à Kadhafi ; le discours d’un homme politique, prononcé sur un ton amène et modéré, mais qui révèle peu à peu une vision raciste qui glace le dos ; le « come out » d’un jeune homme révélant à son père non son homosexualité, ce que celui-ci aurait accueilli à bras ouvert, mais sa conversion à l’Islam, qui déclenche chez lui une réaction délirante.

Photo « Paines Plough » : Michael Ryan et Kevin Harvey dans « Tiny Volcanoes ».