Kaas chante Piaf

Patricia Kaas est actuellement en tournée en France et dans le monde avec son spectacle en hommage à Edith Piaf.

 Patricia Kaas chante 21 chansons d’Edith Piaf, dont on célèbrera en octobre les 50 ans de la mort. Elle a en commun avec Edith des origines populaires, un timbre de voix assuré, une énergie peu commune. Elle est, comme Edith, l’un des rares chanteurs français connus à l’étranger. Des concerts sont programmés cette année à Londres, Helsinki, Istanbul, Shanghai et Tokyo, entre autres destinations européennes et mondiales.

 Son tour de chant n’est pas un « copié – collé » des concerts d’Edith Piaf. Le compositeur Abel Korzienswski, connu pour ses musiques de film, les a profondément réarrangées, de sorte qu’elles portent avec elles non seulement les émotions d’hier, mais les tonalités et couleurs d’aujourd’hui. Un danseur chorégraphie certains morceaux. Le mouvement donne à certaines chansons, telles « emportés par la foule », une grande densité. La mise en scène intègre aussi des images projetées, mais la topographie de la Patinoire de Bordeaux, pas vraiment adaptée à la scène, ne nous a pas permis d’en profiter.

 Dans Sud-Ouest du 21 mars, Patricia Kaas dit d’Edith Piaf : « c’était aussi une passionnée de l’amour, extrême dans tout ce qu’elle faisait, qui s’y est usée… Elle nourrissait ses chansons avec ses défaites amoureuses, cherchait des instants de passion… Sans doute elle aussi, comme moi, avait peur de l’ennui. » Les chansons d’Edith, leur réinterprétation par Patricia prennent aux tripes. Même un amour malheureux, disait Piaf, c’est encore du bonheur. Le spectacle de Kaas en témoigne.

Falstaff de Verdi

Ambrogio Maestri et Svetla Vassileva dans « Falstaff » de Verdi

L’Opéra Bastille, relayé par des cinémas UGC dans plusieurs métropoles françaises donne actuellement Falstaff, une comédie lyrique composée par Giuseppe Verdi en 1893.

 Âgé de quatre-vingts ans, auréolé d’un immense prestige, Verdi a envie de s’amuser. Il décide de mettre en musique et en scène un livret écrit par Arrigo Boito, principalement à partir des Joyeuses Commères de Windsor de Shakespeare.

 Falstaff est un bon gros vivant qui vit, boit et mange au-dessus de ses moyens. Il cherche à se faire entretenir par deux bourgeoises en devenant leur amant. Mais les cibles du stratagème et leur bonne, joliment appelée Mrs Quickly, mènent de concert une stratégie qui aura pour effet d’humilier le bonhomme et de lui faire avouer que « tout dans le monde n’est que farce et duperie ».

 On rit de bon cœur. On retrouve les ingrédients des pièces de Shakespeare, en particulier la forêt obscure et les fées, mais cette fois cuisinés à la sauce comique. La relecture italienne du contexte anglais ajoute à la drôlerie de cet opéra rondement mené, dont la mise en scène de Dominique Pitoiset et la direction musicale de Daniel Oren rendent bien la vivacité. La distribution, toute internationale, est remarquable.

 Voir Falstaff dans une salle de cinéma prive le spectateur des vibrations que ressentent ceux qui ont la chance d’assister au spectacle à l’Opéra Bastille. Les applaudissements, en particulier, sont source de frustration : applaudir lorsque les acteurs du spectacle n’entendent pas, n’a guère de sens ; ne pas applaudir laisse une impression d’inachevé. Il reste que l’opération « Viva l’Opera ! » donne accès à des milliers de personnes à un spectacle que la distance ou le prix d’entrée dissuaderaient.

 On fête cette année le deux centième anniversaire de la naissance de Verdi. Nous conservons la mémoire des célébrations ardentes qui avaient marqué en 2001 à Milan le centenaire de sa mort.

Falstaff sur la scène de l’Opéra Bastille

Rouge ardent

J’aime « Rouge ardent », la dernière chanson d’Axelle Red.

 L’histoire est banale. Une femme se désole de l’abandon de son compagnon qui l’a quittée parce qu’il jugeait leur vie de couple ennuyeuse ; elle lui reproche d’avoir commis une erreur en la quittant.

 « Rouge ardent », dans la musique et dans le texte, nous fait toucher à la vraie poésie. « As-tu trouvé, dans les feux dans les flammes, ton rouge ardent ? As-tu froid ? As-tu peur de l’aurore ? Tu disais tout s’évapore. Tu as eu tort (…) Corps à corps j’en rêve encore. Le feu le vent mille volcans. Rouge ardent quand tu m’embrassais fort. J’en rêve encore. Le jour se lève encore ». Une histoire banale se métamorphose en vif argent, en rouge ardent.

 J’admire Axelle Red, artiste francophone dont la langue maternelle est le flamand, capable de mener de front des études d’avocate et la chanson puis la scène et l’éducation de trois enfants, ambassadrice de l’Unicef pour les droits des femmes et des enfants, amie et icône de stylistes de mode, portant magnifiquement la couleur rouge sur une peau diaphane.

Didon et Enée au Grand Théâtre de Bordeaux

L’opéra « Didon et Enée » de Henry Purcell est actuellement donné au Grand Théâtre de Bordeaux.

 Le Grand Théâtre de Bordeaux, avec sa grande salle à l’italienne de mille places, se prête particulièrement bien à la musique baroque. Henry Purcell, qui composa l’opéra Didon et Enée en 1687, près d’un siècle avant l’inauguration du théâtre, s’y serait senti à l’aise.

 Le metteur en scène Bernard Lévy a pourtant choisi la modernité. Les chanteurs sont en costume d’aujourd’hui et la scène est dépouillée. Sur un écran en fond de scène est projetée la traduction du livret. A la fin de chaque acte, les phrases dites apparaissent nettement, puis s’emmêlent, se tordent et disparaissent dans un nuage digital.

 La reine de Carthage Didon (Isabelle Druet) aime le roi de Troie Enée (Florian Sempey) qu’elle reçoit en son palais. Mais des sorcières malicieuses font croire à Enée que la raison d’état l’appelle à Rome. Didon meurt de chagrin.

 Le metteur en scène souligne le côté comique des sorcières, qui s’amusent à délivrer à Enée un faux message de Jupiter et à précipiter ainsi la ruine de Didon. Le mal n’est pas l’absence de lien social et la prévalence de haines enracinées, comme dans la vraie vie. Il est l’effet d’un jeu, une sorte de pile ou face joué par des sorcières rigolotes. C’est baroque et troublant.

 En première partie, le directeur musical Sébastien d’Hérin propose plusieurs œuvres de Purcell. On est frappé par la multiplicité de ses influences, de Lulli aux danses celtiques d’Ecosse.