Maubuisson

Sur la plage de Carcans

La station de Carcans Maubuisson, en Gironde, est le lieu de nos vacances depuis une quinzaine d’années.

 En ce mois d’août, nous sommes une dizaine à vivre dans notre maison, appartenant à trois générations, de 26 à 86 ans.

 La journée commence par la boulangerie. Tôt le matin, on n’y rencontre pratiquement que des hommes venus acheter baguettes et croissants. Ma nièce Camille pense que c’est leur unique contribution à la communauté familiale, et qu’ils se dédouanent ainsi de leur parasitisme ! Au bout de la rue commerçante, sur la Place du Pôle, se trouve le marchand de journaux. Si Sud-Ouest est déjà sur les rayons, il faut invariablement patienter pour acheter Le Monde et bavarder patiemment avec d’autres lève-tôt. Je reviens à la maison par la promenade du lac. Le soleil levant, les nuages, la brume, le vent ou son absence, donnent au lac un aspect changeant. Chaque matin, c’est un émerveillement.

 Maubuisson est au cœur d’un réseau de pistes cyclables qui courent dans les dunes sous les pinèdes. Selon l’inspiration du moment, on peut aller simplement à la plage, faire un détour par la base sportive de Bombannes, prendre une bière à Lacanau ou flâner sur les rives de l’étang de Cousseau. En fin de journée, le soleil oblique projette des ombres géométriques et les arbres laissent passer une belle lumière tirant sur le rouge. Mais les photos rendent imparfaitement compte des sensations que l’on éprouve. Il faudrait pouvoir rendre compte de l’exquise fragrance de pins et de bruyères émanant d’un sol sableux chauffé à blanc et du concert assourdissant des grillons. Il faudrait montrer la variété des paysages, selon la hauteur et l’orientation des dunes et selon l’état de la forêt, de la haute futaie aux coupes claires. Sur une piste, je croise une famille. Les petits enfants roulent en file impeccable, chacun suivi et conseillé par un adulte. Le grand père ferme la marche ; je crois voir en lui mon propre père escortant ses petits-enfants il y a vingt-cinq ans, immensément sérieux et pourtant souriant. Sur les pistes de Maubuisson, on dépasse de jolies joggeuses et l’on croise de ravissantes cyclistes offrant aux regards leur décolleté.

 De Maubuisson à la plage de Carcans, il n’y a que trois mille tours de pédale à donner. Une fois les bicyclettes cadenassées sur le parking à vélos, on gravit la dune. Au nord et au sud, la bande de sable fin s’étend sur des dizaines de kilomètres, plus de deux cents au total entre la pointe de Grave et Hossegor. Par beau temps, des milliers de baigneurs installent leurs sacs et leurs serviettes. La zone de bains surveillée est délimitée par deux drapeaux bleus et les sauveteurs exercent une vigilance constante : c’est que les courants peuvent être forts et les vagues déconcertantes. Au soir d’une journée de canicule, immerger son corps couvert de sueur, plonger sous les vagues et se sécher allongé sur le sable dans une semi-inconscience offre un moment de vrai bonheur.

 Au soir couchant, nous partageons le dîner sur la terrasse, souvent introduit par un pastis ou un punch. Des propos s’échangent, des plaisanteries se croisent, on parle de la recherche d’un château bordelais pour un mariage l’an prochain, on évoque le livre que l’on est en train de lire. La nuit s’établit peu à peu. On allume sur la table de petites bougies. Les premières étoiles apparaissent au firmament.

 Maubuisson est notre petit coin de paradis.

Rêve de plage

 

Sur la plage de Carcans (Gironde). Photo "transhumances"

 Etendu sur ma serviette sur le sable, je savoure chaque minute de ce soleil qui sèche ma peau. Après l’effort du parcours à bicyclette dans les dunes, après l’excitation du bain dans les vagues, c’est un moment de pur bonheur.

 Je ferme les yeux.

 Le son de l’océan me parvient, mêlé à des bribes de conversations. L’intensité sonore fluctue comme une houle, en fonction de la proximité des personnes, du souffle de la brise et des balancements de mon esprit entre l’acuité et le sommeil.

 Les mots les plus simples, « crème solaire », « soif », « se baigner » prennent une couleur différente selon qu’ils sont prononcés par un enfant, un homme âgé ou une jeune femme que l’on devine jolie.

 La violence des mots : « petit imbécile, tu mérites une taloche », et la gifle qui claque. La tendresse des mots : « je t’aime. » L’anxiété : « retrouverai-je du travail à la rentrée ? » La joie : « comme nous sommes bien, tous ensemble ! » 

Maubuisson, le lac en avril

Lac de Carcans Hourtin non loin de La Gracieuse

En avril, le lac de Carcans Hourtin inspire la quiétude. Nous laissons les bicyclettes en bordure de la piste, aujourd’hui malheureusement défoncée, qui mène de la base de Bombannes à la pointe de la Gracieuse, sur la rive ouest du lac.

 L’étroite bande de sable blanc en bordure de l’eau est exposée au soleil et protégée du vent par la dune et la forêt. Le ciel et la pinède se reflètent à la surface, doucement striée de roseaux. En cette fin d’après-midi, un rayon de soleil nous réchauffe encore.

 C’est un moment de pur bonheur.

 

Jeune pousse surla rive du lac de Carcans Hourtin

Fin d’été

Nous avons choisi de rentrer de Maubuisson à Watford en deux jours : nous avons roulé samedi de Maubuisson à Saint Malo, passé la nuit à Saint Malo et pris le ferry « Bretagne » jusqu’à Portsmouth.

 Prendre le soleil sur le pont du bac du Verdon et admirer au loin le phare de Cordouan.

 Gouter des Pineau dans une exploitation proche de Royan et nous faire expliquer par une jeune femme enthousiaste les merveilles d’un cocktail au Cognac et au Schweppes et le délice d’un fromage blanc au Pineau.

 Sur une route balayée par le vent et les averses, dépasser un vieux cabriolet britannique rutilant, avec à son bord deux gentlemen habillés comme des aviateurs des temps héroïques.

 S’imprégner du souvenir de Colbert sur la grand place de Rochefort, dans un bar dont les serveuses arborent le chapeau des demoiselles.

 Déguster des galettes de sarrasin avec des bolées de cidre « Mac Low » dans une crêperie de Saint Malo, et rentrer à l’hôtel du Palais prendre une douche chaude qui nous fera oublier le froid mordant de cette pluvieuse soirée de septembre.

 Dans la file des voitures attendant le contrôle des passeports à l’embarcadère, laisser notre place à un couple de retraités anglais qui parcourt l’Europe en tandem.

 Naviguer par grosse mer et voir s’approcher sous un rayon de soleil l’Ile de Wight et ses grandes falaises de craie blanche.

 Dire au-revoir à l’été, et, bien après les écoliers, se préparer à la « rentrée ».

 Photo « transhumances » : le ferry « Bretagne » dans le port de Saint Malo.