Guadeloupe, bananeraie à Basse Terre

Bananeraie de la plantation Grand Café de Bel Air, Basse Terre

La visite de la Plantation Grand Café de Bel Air permet de découvrir les stratégies « raisonnées » d’une exploitation agricole tropicale.

 La Plantation Grand Café se situe dans les hauteurs de Sainte Marie, le site où Christophe Colomb débarqua lors de son deuxième voyage en 1493. Malgré son nom, elle est actuellement consacrée à la production de bananes pour l’exportation vers la métropole. Des caféiers vont être plantés prochainement afin d’élargir l’offre de la boutique du domaine.

 Le circuit se compose d’une visite de l’entrepôt de tri et de conditionnement des bananes, un tour commenté de la bananeraie à bord d’une charrette équipée de bancs et remorquée par un tracteur, et enfin la dégustation d’un vin moelleux de banane. Notre guide et conducteur est un passionné de ce qu’il appelle « l’agriculture raisonnée », passant progressivement vers un modèle plus respectueux de l’environnement et plus diversifié.

 

Entrepôt et centre de tri de la banane, Plantation Grand Café

La production de la banane d’exportation vers la métropole présente les caractéristiques les plus extrêmes de l’agriculture capitaliste : utilisation massive de pesticides, monoculture conduisant a l’épuisement des sols, sélection d’un unique produit au mépris de la diversité des saveurs, déconnexion totale entre le producteur et le consommateur, fluctuation du prix de vente sans relation avec le coût de production. Le consommateur français attend un produit d’un gabarit déterminé, mûr et sans tâche. Le produit, arrivé vert à Dunkerque, est stocké et porté maturité dans une mûrisserie. Il y est acheminé dans des navires frigorifiques réfrigérés une fois par semaine, à la température constante de 13ºC. Au domaine, il est trié et traité chimiquement contre les parasites.

 En amont, la bananeraie est organisée de telle sorte que chaque semaine arrive au centre de tri le tonnage de régimes de bananes souhaité, selon la qualité requise par le cahier des charges. Ceci implique un travail constant de surveillance du cycle de 9 mois pendant lequel le bananier se développe. En permanence, les regimes sont taillés pour ne conserver que les bananes au gabarit souhaité et les plants morts sont éliminés pour que se développent les surgeons. La bananeraie fait l’objet d’un contrôle sanitaire par une autorité indépendante qui, en cas de présence de parasites, ordonne le déversement par avion de pesticides. La piste d’aviation, une pente herbeuse face aux alizées, fait partie du domaine mais dessert toutes les exploitations de la région.

 Notre guide nous parle avec passion de la stratégie du domaine pour se rapprocher de l’agriculture biologique. Peu à peu, l’usage d’agents chimiques est supprimé ou limité dans toutes les phases du processus. Un bon exemple est l’alternance des sols entre bananeraie et canne à sucre. La canne à sucre épuise moins les sols. Par ailleurs, les parasites de la banane ne trouvent pas se nourrir avec la canne et disparaissent. En moyenne, l’épandage de pesticides a lieu trois fois par an, contre le double dans d’autres îles des Caraïbes, et tous les efforts sont faits pour en réduire l’utilisation.

 Le Domaine Grand Café n’est pas passé à l’agriculture biologique. Il faudrait sans doute pour cela que le consommateur français soit éduqué à gouter des bananes de calibres et de saveurs différents. Mais il travaille avec des producteurs biologiques dans d’autres pays, notamment Cuba, avec pour objectif de tendre progressivement vers un modèle de production plus sain. Le passage se fait progressivement, par étapes. Ce qui est remarquable, c’est qu’il répond à une stratégie à dix ans, murement réfléchie et, comme le dit notre guide, « raisonnée ».

Piste de l'aérodrome de la Plantation Grand Café

Guadeloupe, Marie-Galante

Marie Galante, Maison Murat

L’île de Marie Galante, nommée d’après l’un des vaisseaux de Christophe Colomb, se situe à une heure de bateau au sud de Pointe à Pitre.

 De forme quasi circulaire, l’île vit principalement de la canne à sucre. Ses trois distilleries produisent des rhums parmi les plus réputés des Antilles. Nous visitons la Distillerie du Pere Labat. La chaine de production elle-même, du broyage de la canne à la fermentation et à la distillation, est visiblement très ancienne ; en revanche, les installations périphériques, cave de vieillissement, embouteillage, retraitement des déchets, boutique de dégustation et de vente, ont fait l’objet d’investissements récents. Le punch au citron et au miel est un véritable délice. La spécialité de l’île est le rhum « décollage » titrant 59º.

 

Marie-Galante, ouvriers de la distillerie Bielle

Notre hôtel, le Cocobeach Resort, est situé au bord du lagon au sud de l’île, près de Grand Bourg. C’est un site de carte postale : une petite crique ombragée de cocotiers, une étendue d’eau turquoise, les vagues de la barrière de corail et, à l’horizon, le relief massif de l’île de la Dominique.

Marie-Galante, Cocobeach Resort

L’industrie sucrière est aujourd’hui concentrée sur une seule usine. Mais il y en avait autrefois près d’une centaine, dont la pièce maitresse était un moulin à vent utilisé pour concassage de la canne. Le site le plus intéressant est l’habitation Murat, récemment restaurée par le Conseil Général. La maison de maitre est une jolie bâtisse en pierre de corail blanche. Le parc a été nettoyé de ses mauvaises herbes, ce qui met en valeur ses arbres magnifiques, en particulier cocotiers et flamboyants.

 Il y a encore à Marie Galante des plages intactes de sable blanc, telle celle du Vieux Fort, au nord de l’île. A quelques centaines de mètres au large, un ilot minuscule a été planté de cocotiers.

 Le restaurant Plaisir des Marins, près de Saint Louis, est une entreprise familiale dont le chef, au sens de patron et de cuisinière, est une dame plutôt âgée. Son Cabri Colombo est succulent.

 Le monument aux morts de la ville de Saint Louis, à l’entrée du débarcadère, présente la statue d’un « poilu » de race noire. Quarante cinq habitants de cette commune qui ne devait pas compter plus de 4000 habitants au début du vingtième siècle, sont morts pour la France pendant la première guerre mondiale. Parmi ceux-ci, huit sont morts dans les Balkans, en Serbie, en Grèce ou en Turquie. J’ai relevé le nom de Leonville Laboral, probablement descendant d’esclaves affranchis, mort en Grèce le 10 mars 1917.

Guadeloupe, la mangrove

Racines de palétuviers roses dans la mangrove de Saint Rose

La construction de l’aéroport du Raizet et celle du centre commercial Jarry de La Guadeloupe se sont faites aux dépens de la mangrove, que Wikipedia définit comme « un écosystème de marais maritime incluant un groupement de végétaux principalement ligneux spécifique, ne se développant que dans la zone de balancement des marées appelée estran des côtes basses des régions tropicales.»

 Nous partons en excursion au port de Sainte Rose, petite station balnéaire au nord de l’île de Basse Terre. Nous nous déplaçons en zodiacs sous la responsabilité d’un chef d’expédition qui sera aussi notre conférencier en écologie du littoral. Lorsque nous approchons de la mangrove de l’estuaire de la Rivière à Moustiques, nous arrêtons les moteurs et les zodiacs sont amarrés les uns aux autres derrière celui de l’animateur.

 La mangrove joue un rôle primordial dans l’équilibre géologique des îles tropicales. Associée à la barrière de corail, elle fait barrage aux tempêtes océaniques et aux tsunamis ; elle protège la barrière de corail des alluvions charriés depuis les montagnes, qui menaceraient sans elle de l’étouffer.

 Nous observons les palétuviers, avec leurs longues racines aériennes enchevêtrées. Longues, ce qui leur permet d’adapter la hauteur de l’arbre au mouvement des marées ; enchevêtrées, ce qui rend l’arbre résistant aux vents et aux courants. Le système de reproduction du palétuvier est une merveille d’ingénierie naturelle : le vent, et non les insectes, est l’agent de la pollinisation ; les graines fécondées sont contenues dans une sorte de flotteur végétal qui peut dériver sur des dizaines de kilomètres jusqu’à trouver le lieu de germination idéal, à bonne profondeur.

 La dernière partie de la promenade est une plongée dans le lagon, proche de la barrière de corail. Dans l’eau translucide, c’est une symphonie de couleurs.

Le lagon à Sainte Rose

Guadeloupe, forêt tropicale

Végétation tropicale

La route de la Traversée permet de rejoindre l’ouest de l’île Basse Terre à partir de Pointe à Pitre en pénétrant dans le Parc National de la Guadeloupe, qui inclut aussi le volcan de la Soufrière.

 Après une halte à la jolie Cascade des Ecrevisses, on rejoint la Maison de la Forêt. Deux parcours de découverte de la forêt tropicale ont été organisés. Bien que nous soyons en saison sèche, il pleut abondamment et le sentier est boueux. Tout autour de nous, nous respirons l’humus, ce qui ne peut que ravir l’auteur de « transhumances » ! La lumière, rare dans le sous-bois épais, se reflète sur les feuilles trempées et les gouttes d’eau semblent des diamants.

Oiseau trembleur

 Les arbres sont d’une hauteur inhabituelle pour les randonneurs des futaies européennes. Fougères et feuillages ont eux-mêmes un gabarit hors du normal. De longues racines aériennes pendent comme des lianes. Nous rencontrons une mangouste et des oiseaux trembleurs nous observent alors que nous nous protégeons de la pluie sous un carbet.