Frost Nixon

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Frost Nixon, film de Ron Howard (2008), présente le duel entre un président humilié soucieux de refaire sa réputation et un homme de télévision à la recherche d’un coup sensationnel.

En 1977, l’ancien président Richard Nixon (Frank Langella), qui travaille à son autobiographie, est à la recherche d’une opération médiatique qui lui permette, au-delà des ombres du Watergate qui l’ont poussé à la démission l’année précédente, d’entrer dans l’histoire comme un grand président. Ses conseillers croient l’avoir trouvée : David Frost (Michael Sheen), un animateur britannique de divertissements télévisés, lui propose une série d’interviews sur différents chapitres de sa vie et de sa présidence. Le Watergate ne sera pas mis de côté, mais les domaines dans lesquels Nixon peut se vanter d’un bon bilan auront toute leur place. Pour Nixon et sers conseillers, l’affaire promet d’être bonne : Frost devrait être superficiel et complaisant ; pour ne rien gâcher, le cachet dépassera le demi million de dollars.

Ce ne sera pas si simple. L’objectif de Frost est de réaliser l’interview du siècle, celle qui attirera des centaines de millions de téléspectateurs dans le monde et lui gagnera notoriété et fortune. Pour cela, il faut qu’il obtienne, devant les cameras, ce que ni les juges ni les députés n’ont obtenu : une confession de culpabilité de la part de l’ancien président.

David Frost attaque d’emblée : pourquoi n’avez-vous pas brûlé les cassettes contenant les enregistrements de conversations à la Maison Blanche concernant le Watergate ? Nixon ne se laisse pas désarçonner. Il explique, patelin, que le système d’enregistrement avait été mis en place par le président Johnson et que, par souci de transparence démocratique, il n’avait pas voulu le mettre en cause.

Frost presente d’atroces images de la guerre du Vietnam et du Cambodge. Là encore, Nixon retourne la situation à son avantage : les souffrances des populations civiles étaient dues à l’ennemi communiste !

L’entreprise de David Frost menace d’échouer. Le doute gagne son camp, la série d’émissions ne se vend pas, la faillite morale et financière menace. Nixon semble inébranlable. En réalité, il est fragile. Une nuit, ivre et insomniaque, il appelle Frost et confesse que toute sa vie il a du s’imposer aux gens bien nés sans jamais baisser la garde. Frost reprend courage. Il fait rechercher par son équipe une conversation, non encore publiée, de Nixon avec l’un de ses conseillers, qui démontre qu’il avait été au courant des écoutes au siège du Parti Démocrate plus tôt qu’il ne l’avait publiquement admis.

Lors de la dernière interview, Frost met Nixon dans les cordes. Celui-ci finit par lancer « lorsque le président fait quelque chose, ce n’est pas illégal ». Il vient d’avouer qu’il se sentait au dessus des lois. Après une interruption de séance, il reconnaît qu’il a participé à une obstruction de la justice, qu’il a laissé tomber les Américains. Plus que les mots, c’est son visage ravagé qui exprime son désespoir, et peut-être aussi le soulagement de s’être libéré d’un poids. Frost se définissait comme un « performer », un homme du spectacle télévisuel. Il a gagne son duel contre Richard Nixon.

Photo du film « Frost Nixon » : Frank Langella et Michael Sheen

Abraham Lincoln, saint ou pécheur

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La chaîne de télévision britannique BBC4 vient de programmer un documentaire sur la personnalité d’Abraham Lincoln : « Abraham Lincoln, saint or sinner ? ».  Il fournit un éclairage intéressant sur un moment clé de l’histoire des Etats-Unis.

Abraham Lincoln (1809 – 1865) est vénéré comme un demi-dieu aux Etats-Unis, l’émancipateur des esclaves, le père de la nation. Le candidat Barak Obama s’est souvent référé à lui pendant sa campagne pour l’élection présidentielle.

Le documentaire diffusé par BBC4 s’interroge sur la véritable personnalité de Lincoln. Des nostalgiques des Etats Confédérés lui reprochent sa brutalité dans l’écrasement de la sécession ; des historiens rappellent qu’il était convaincu de l’inégalité des races et que s’il souhaitait la disparition de l’esclavage pour des raisons économiques, il était aussi partisan de déporter les noirs dans des colonies hors des Etats-Unis ; ils lui reprochent aussi le non respect des engagements pris à l’égard des Sioux et  la répression féroce qui suivit leur révolte.

La référence aux Sioux donne une clé de la guerre de Sécession. Au milieu du dix-neuvième siècle, c’est la ruée vers l’ouest. Les émigrés arrivés dans la Nouvelle Angleterre rêvent d’acquérir une terre qu’ils puissent cultiver ; les grands propriétaires du sud ont le projet de constituer de grands domaines où ils feront travailler la main d’œuvre gratuite dont ils disposent, les esclaves. Les deux modèles sont antagonistes : l’agriculture familiale ne peut survivre si elle fait face à la concurrence de grandes exploitations esclavagistes.

Le Parti Républicain et Lincoln s’accommodent très bien de l’esclavage tant qu’il est cantonné au Sud. Ils sont en effet convaincus de l’inégalité des races, et ne voient pas d’objection à ce que les noirs soient relégués à un statut inférieur. Mais ils s’opposent à sa généralisation au Nord et son exportation à l’Ouest du continent américain pour des raisons économiques : l’esclavage fausse la concurrence.

Les Etats du Sud font sécession et créent une Confédération. La guerre qu’ils déclenchent en 1861 tourne mal pour l’Union. En tant que Commandant en Chef, Lincoln a une idée géniale : proclamer l’émancipation des esclaves. Cette manœuvre militaire a des résultats inespérés. Au sud, l’économie est désorganisée ; des milliers de noirs rejoignent l’armée Unioniste. En 1865, l’armée confédérée capitule. Lincoln est étonné par la vaillance de ses soldats noirs ; ses préjugés racistes se fissurent.

Lincoln mourut assassiné quelques mois après la capitulation des sécessionnistes, un vendredi saint : tout se conjuguait pour le faire accéder au statut de Saint. Le documentaire de BBC4 montre qu’il ne fut pas un saint, mais un homme conditionné par les préjugés de son temps qui, confronté à des circonstances exceptionnelles, sut prendre des décisions courageuses et accepter de réviser des idées reçues.

Cent ans après la déclaration d’émancipation, Martin Luther King prononça son fameux discours « I had a dream ». Le début du discours est peu connu. Il dit qu’en 1863 le gouvernement américain tira un chèque au bénéfice de ses citoyens esclaves, mais qu’il se révéla sans provision. Il réclama que la dette soit, enfin, payée.

Illustration : photo d’Abraham Lincoln.

Le Foundling Museum à Londres

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Le Foundling Museum, non loin du British Museum à Londres, conserve le souvenir du Foundling Hospital qui, du dix huitième siècle au début du vingtième accueillit les enfants abandonnés.

Le musée conserve le souvenir des bienfaiteurs du Foundling Hospital, le philanthrope Thomas Coram, le peintre William Hogarth et le musicien George Friedrich Haendel.

L’exposition temporaire a pour titre « Threads of Feeling »,  fil de sentiments. Plus de quatre mille bébés furent abandonnés anonymement au Foundling Hospital entre 1741 et 1760. Ils partaient en nourrice à la campagne, puis revenaient dans l’institution pour recevoir une formation qui les conduisait le plus souvent à des positions de domestiques pour les filles, de soldats pour les garçons.

Une fiche signalétique était remplie pour chaque enfant. On y attachait un morceau du vêtement qu’il portait lors de son abandon, ou un message ou objet laissé par la maman. Bien que l’enfant fût adopté par l’Etat, on voulait que sa mère puisse le reprendre si sa fortune personnelle s’améliorait. Le tissu permettait de l’identifier.

Les pages du registre du Foundling Hospital sont profondément émouvantes car elles nous parlent de séparations déchirantes. Elles offrent aussi un vaste échantillon de textiles vieux de près de trois siècles et une précieuse source d’information pour les historiens.

Illustration : The Foundling Museum, exposition « Threads of Feeling », tissu brodé de fleurs et de feuilles attaché à la fiche signalétique d’un petit garçon admis le 25 août 1758.

La maison de Dickens à Londres

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Charles Dickens (1812 – 1870) vécut deux ans dans une maison de Londres, aujourd’hui consacrée à son souvenir.

Nous avons croisé deux fois les pas de Charles Dickens ces dernières semaines. Au théâtre, nous avons assisté à une adaptation de son roman « Les Grandes Espérances ». Au cinéma, le film « Au-delà » du réalisateur Clint Eastwood montre le personnage joué par Matt Damon faire un « break » dans sa vie et visiter à Londres la maison de son héros, Charles Dickens. Il contemple en particulier « le rêve de Dickens », un tableau de Robert W. Buss représentant le romancier endormi à la table de sa bibliothèque et songeant aux personnages qu’il a créé tout au long de sa carrière.

Dickens occupa une maison bourgeoise typiquement londonienne, 48 Doughty Street, dans l’arrondissement (borough) de Camden pendant les deux ans qui suivirent son mariage, de 1837 à 1839. Dans le musée qui y a été installé en 1925, on trouve de nombreux souvenirs, portraits de l’écrivain, meubles, manuscrits.

Dickens écrivait ses livres sous forme de feuilletons d’une trentaine de pages, ce qui permettait de faire grandir l’intérêt du public et aussi de tenir compte des réactions des lecteurs pour la rédaction des chapitres non encore publiés.

Illustration : Maison de Dickens à Londres, www.dickensmuseum.com