Wootton Bassett, la ville qui pleure

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Le 14 mars, 10.000 motards ont traversé la ville de Wootton Bassett en hommage aux soldats britanniques morts en Afghanistan et pour lever des fonds pour une institution de bienfaisance, « Afghan Heroes Charity ».

Wootton Bassett est une petite ville de 12.000 habitants à 80 km au sud-ouest d’Oxford. Elle est devenue célèbre à partir de 2007. En raison de travaux sur la base de la Royal Air Force qui les recevait habituellement, les corps des soldats tombés en Afghanistan durent transiter par un autre aéroport militaire, tout proche de la ville, sur leur chemin pour un institut médico-légal d’Oxford. Peu à peu, les habitants prirent l’habitude de se rassembler à leur passage. De rapatriement en rapatriement la foule grossit jusqu’à atteindre des centaines, voire plus d’un millier de personnes qui se recueillent au son du tocsin au passage des cercueils. La presse, les télévisions, les radios sont là. Wootton Bassett est devenue une institution.

La manifestation de solidarité des motards avec les soldats morts dans le conflit d’Afghanistan met en relief des points forts de la culture anglaise aujourd’hui. Il y a, fortement enraciné, un nationalisme qui va de pair avec l’admiration pour l’armée et ses héros. Il y a l’engouement pour les institutions de bienfaisance, les « Charities » qui mobilisent des milliers de personnes jusque sur les lieux de travail. Et puis il y a, plus inattendu pour les français, le goût pour les émotions collectives et les pleurs partagés qui s’était manifesté jusqu’à l’impudeur lors de la mort de la Princesse Diana.

(Photo The Guardian, motard traversant la rue principale de Wootton Bassett sous les vivats de la foule.)

Mary Robinson, « une terrible urgence »

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Le quotidien « The Guardian » a publié le 13 mars une interview de Mary Robinson, présidente de la République d’Irlande dans les années quatre vingt dix, par la journaliste Aida Edemariam.

Agée de soixante cinq ans, Mary Robinson revient vivre dans son pays après treize années passées à New York. Elle y avait occupé le poste de présidente de la Commission des Nations Unies pour les droits de l’homme, avant de devoir démissionner sous la pression de l’Administration Bush qui la considérait trop tiède sur la « guerre contre le terrorisme » et pro palestinienne.

Membre des Anciens, un groupe de 12 éminents leaders réuni par Nelson Mandela et présidé par Desmond Tutu, elle entend se consacrer maintenant à la « justice climatique », en particulier pour que les peuples les plus affectés par le réchauffement climatique (généralement ceux qui contribuent le moins au phénomène) reçoivent une juste compensation. Elle pense que, face à des gouvernements paralysés, c’est à la société civile qu’il faut en appeler. Elle est particulièrement préoccupée par la fragilité de la plus grande démocratie du monde, les Etats-Unis : « Obama essaie d’offrir un leadership, mais je pense que le système politique américain est en train de devenir dysfonctionnel, et cela est vraiment, vraiment préoccupant. »

Sur le thème de la justice climatique, Mary Robinson ressent un terrible sens de l’urgence.

(Photo The Guardian : Mary Robinson avec Desmond Tutu)

Nelson et Mandela

 

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« Transhumances » a consacré des articles à Horatio Nelson et Nelson Mandela. Dans le supplément « Work » du quotidien The Guardian daté du 13 mars 2010, Jonathan Gifford les cite parmi des personnages historiques qui peuvent inspirer nos comportements au travail aujourd’hui.

Gifford cite Elisabeth Garrett Anderson qui fut sans cesse à l’offensive pour que la société Victorienne l’accepte dans la caste exclusivement masculine des médecins, n’acceptant jamais un non comme réponse. Il mentionne Abraham Lincoln et sa vision audacieuse d’une société dont tous les membres seraient égaux. Il loue le pragmatisme de Zhou Enlai, décidé à ce que la modernisation de la Chine avance malgré les errances de la révolution culturelle.

On lira ci-dessous les paragraphes de cet article qui concernent deux personnages auxquels le blog « transhumances » s’est déjà intéressé : Horatio Nelson et Nelson Mandela.

Diriger depuis la  première ligne, Horatio Nelson

Quiconque assume une tâche ardue ou déplaisante dirige depuis la première ligne : faire un appel téléphonique difficile ; se porter volontaire pour une tâche ingrate mais essentielle ; ou prouver que vous ne demandez pas à d’autres d’accomplir quelque chose que vous n’accompliriez pas vous-même.

Diriger depuis la première ligne, c’est ce que fit Nelson ; cela le définit. Il perdit un œil en dirigeant un débarquement en Corse, quand un impact de boulet de canon jeta du sable et des pierres sur son visage. Dans un autre débarquement. A Tenerife, il fut si gravement blessé qu’il fallut l’amputer d’un bras. Il gagna la célébrité et la gloire en capturant non un, mais deux vaisseaux espagnols à la bataille de Cap Saint Vincent.  C’est ainsi que Nelson gagna la loyauté inconditionnelle de ses hommes (…)

Quand Nelson imagina son plan consistant à attaquer la flotte franco-espagnole en navigant à angle droit à travers la ligne des navires ennemis, au lieu de s’aligner pour le traditionnel échange de bordées de canonnades, il savait que les vaisseaux de tête seraient exposés au feu ennemi pendant un temps désespérément long avant d’être en position de répondre.  L’usage était de placer le navire amiral au centre de la ligne ; Nelson mit le HMS Victory en tète de la ligne. Il resta sur  le pont à commander la bataille (« aucun capitaine ne peut vraiment se tromper s’il place son bateau le long de celui d’un ennemi ») et il fut tué par un marin français depuis un bateau avec lequel le Victory avait engagé le combat. « Grâce à Dieu, j’ai fait mon devoir », dit-il en mourant.

Changer l’état d’esprit, Nelson Mandela

Nous reconnaissons tous rapidement l’atmosphère, ou la culture, prégnantes dans toute organisation ; changer une mauvaise culture peut être la chose la plus difficile à laquelle des managers ou des travailleurs soient confrontés. Nelson Mandela changea l’état d’esprit d’une Afrique du Sud divisée qui avait frôlé la guerre civile et dont l’avenir était lourd de la probabilité d’autres affrontements interraciaux.

Mandela, alors qu’il était jugé pour haute trahison en raison d’actes de sabotage contre l’état Sud-Africain, avait dit « tout au long de ma vie je me suis consacré à la lutte du peuple africain. J’ai combattu contre la domination blanche, et j’ai combattu contre la domination noire. J’ai chéri l’idée d’une société démocratique et libre dans laquelle tous vivraient ensemble en harmonie et avec des opportunités égales. C’est un idéal pour lequel je souhaite vivre et que je voudrais atteindre. Mais si c’est nécessaire, c’est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir ».

Malgré 27 ans passés en prison, Mandela en sortit avec ces idéaux intacts. En 1994, lorsque les premières élections multiraciales eurent lieu, les Sud Africains blancs savaient que la majorité noire du pays, si longtemps exclue du pouvoir par l’apartheid, élirait un gouvernement majoritairement noir.

En fait Mandela mena une campagne de pardon personnel et mit en place une ingénieuse Commission Vérité et Réconciliation. Il dirigea le nouveau gouvernement multiracial avec une empreinte légère mais décisive et donna le ton – tranquille, inclusif, enthousiaste – qui allait créer un nouvel état d’esprit dans le pays.

Jonathan Gifford publie chez Marshall Cavendish un livre intitulé  « History Lessons ; what business and managers can learn from the movers and the shakers of history » (ce que les entreprises et les managers peuvent apprendre de ceux qui ont ébranlé et secoué l’histoire). Photo « transhumances »

Le Big Bang en question

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L’émission scientifique de la chaine britannique BBC2 « horizon » était le 9 mars consacrée à une question provocante : « est-ce que tout ce que nous savons de l’univers est faux ? ».

L’émission est tournée à la manière d’un thriller : images répétitives d’une expérience de gonflage et de « big bang » d’un ballon dans un hangar glacial, visages de scientifiques dans un miroir déformant, musique anxiogène. Elle inclut aussi des interviews de cosmologues d’universités américaines et anglaises, des images d’un télescope au Nouveau Mexique et un reportage sur un laboratoire installé dans une mine désaffectée du Minnesota, à 800 mètres de profondeur, pour tenter de prouver l’existence de l’antimatière.

La théorie du big bang, c’est-à-dire la création de notre univers par explosion et inflation à partir d’un noyau infiniment petit, est née d’un modèle mathématique qui, à partir de l’observation de la situation actuelle de l’univers, est capable de remonter le temps. Il a un très grand pouvoir explicatif : les phénomènes observés répondent bien, en général, à ce qu’il prédit. Mais avec les progrès des instruments d’observation, des anomalies apparaissent dans les températures ou les vitesses de rotation des galaxies. Les galaxies ne se comportent pas comme le modèle dit qu’elles devraient se comporter.

Pour intégrer les anomalies, le modèle doit ajouter de la gravité et inventer un phénomène invisible (« noir ») qui équilibre les équations. C’est ainsi qu’est apparue la « matière noire », qui serait invisible et pourrait traverser la matière que nous connaissons, ce qui explique l’installation du laboratoire dans le sous-sol du Minnesota. D’autres anomalies ont été constatées, ce qui a rendu nécessaire l’introduction dans le modèle de « l’énergie noire », qui remplirait le vide intergalactique. Plus récemment, d’autres observations ont conduit des cosmologues à faire l’hypothèse d’un « flux noir » qui pourrait provenir d’autres univers.  

Tout ce que nous savons de l’univers est-il faux ? Jamais la mathématique n’a été aussi développée et jamais notre observation de l’univers n’a été aussi riche. Mais l’histoire de la création racontée par la théorie du big bang a besoin de tant d’additifs « noirs » qu’un doute s’installe. Une révolution scientifique, pareille à la découverte de la loi de la relativité il y a un siècle, est-elle imminente ?

L’émission « Horizon » de BBC2 peut être vue sur http://www.bbc.co.uk/iplayer/

Photo du télescope spatial Hubble, galaxie spirale, http://www.hubblesite.org/