Je souhaite partager dans « transhumances » ce qui m’a étonné, dans ma vie personnelle comme dans l’actualité.
Dans cet article de transhumances, les péripéties de l’élection présidentielle ont constitué mes principaux sujets d’étonnement.
Siphon
Le siphonnage des voix du Parti Républicain et du Parti Socialiste au premier tour de l’élection présidentielle par les partis d’extrême droite et d’extrême gauche a été d’une ampleur surprenante. Valérie Pécresse a recueilli quatre fois moins de voix que François Fillon en 2017. Quant à Anne Hidalgo, elle a été laminée par Jean-Luc Mélenchon, qui a obtenu treize fois plus de suffrages.
J’ai été particulièrement touché par la déroute d’Anne Hidalgo. C’est une personnalité politique reconnue, exerçant la responsabilité de maire de la plus grande ville de France, poste qui avait servi de tremplin à Jacques Chirac en d’autres temps. Son programme était clair, équilibré, crédible. Elle proposait aux électeurs « de participer à la grande aventure de la réconciliation, du redressement et de la prospérité de notre pays, autour d’un projet républicain, social et écologique. » Ce programme ferait de la France « un exemple parmi les nations et un espoir pour les générations futures, au sein d’un pays plus uni et d’un peuple plus fraternel ». Moins de deux électeurs sur cent se sont laissé convaincre. J’en reste étonné.
La peste et le choléra
Pour une partie des électeurs de Jean-Luc Mélenchon, déçus que le dimanche 10 avril ne se soit pas révélé un « dimanchon » et que Macron et Le Pen aient accédé au second tour comme en 2017, le choix proposé apparaissait comme « entre la peste et le choléra ».
Le projet du Rassemblement National saperait les fondements du pacte républicain, en introduisant dans la Constitution la « préférence nationale », c’est-à-dire une discrimination envers les étrangers en ce qui concerne l’accès au travail, au logement, à la santé. Il dénonce les traités par lesquels la France s’est engagée à introduire dans sa législation des lois européennes. Il ne reconnaît comme seule réponse aux délits et aux crimes que la prison, y compris la « perpétuité réelle ».
Que l’on puisse mettre sur le même plan la peste Macron et le choléra Le Pen reste pour moi un sujet d’étonnement et même, je l’avoue, d’effarement. Je comprends que la personnalité d’Emmanuel Macron puisse susciter le rejet, voire la haine. Je comprends les désaccords profonds avec son libéralisme économique. Mais ceci peut-il gommer la rupture avec le pacte républicain qu’aurait signifié l’élection d’une candidate « illibérale » à la manière du Polonais Kaczynski ou du Hongrois Orban ?
Je savais que l’opinion en France est plus fragmentée que jamais, en particulier parce que les réseaux sociaux donnent à chacun la nourriture sucrée qu’il attend et qu’ils ne favorisent pas la confrontation des opinions. Une chose est de le savoir intellectuellement, autre chose de l’éprouver dans les relations avec des proches. La réconciliation est décidément un enjeu de société décisif pour les années à venir.