Je souhaite partager dans « transhumances » ce qui m’a étonné, dans ma vie personnelle comme dans l’actualité.
Dans cet article de transhumances, je m’étonne des innovations introduites par des viticulteurs bordelais pour contrer la désaffection du vin rouge ; j’admire les mains d’un homme venu visiter un proche à la maison d’arrêt ; je m’interroge sur la récurrence de la prison dans le parcours d’Evguéni Prigogine, récemment disparu dans un « accident » d’avion.
Bordeaux sucré
Sous la plume de Denis Lherm, le quotidien Sud-Ouest a consacré le 26 juillet un article à la crise viticole dans le Bordelais. En dix ans, la consommation de vin en France a diminué de 32% et cet effondrement concerne principalement le vin rouge, spécialité du Bordelais.
L’article est intitulé « on ne doit plus produire ce qu’on ne vend pas ». Ses propositions sont décapantes. Il faudrait vendre le vin en bouteilles de 25cl, comme le coca, la bière, les jus de fruit. « Prenez un rouge, ajoutez dix grammes de sucre, mettez le au frigo, ça se boit comme un blanc », dit un œnologue.
L’article mentionne La Turbullente, un vin mono-cépage 100% Cabernet franc, 11,5° d’alcool, pétillant, à boire frais, capsulé. Créé pour le festival Garorock, il s’adresse à un public jeune réputé réfractaire au vin rouge.
Les mains
À la maison d’arrêt, les box dans lesquels avocats et visiteurs reçoivent les personnes détenues font face à ceux des personnes venues rencontrer leurs fils ou leurs amis détenus.
J’attends qu’arrive l’homme que je dois rencontrer, comme chaque vendredi matin. Dans le box face au mien a pris place un homme d’âge médian, grand, bien habillé, portant des lunettes. Un homme jeune est introduit par un surveillant, qui ferme la porte.
Ils sont assis face à face. Par l’étroite fenêtre face à moi, je ne vois que les mains de celui qui vient du dehors, ses cuisses et ses genoux. Je suis fasciné par ses mains, noires, fines, extraordinairement mobiles. Elles sont à contrejour, donnant l’illusion d’ombres chinoises.
Paumes retournées, index tendu : des reproches, des intimations. Paumes ouvertes vers le haut : surprise, interrogations. Mouvements vifs, arabesques : l’excitation de la rencontre dans le temps contraint de la demi-heure de parloir. Langage du corps, langage du cœur.
Roulette russe
« L’accident » survenu à l’avion du chef de la milice Wagner, Evguéni Prigojine, ne m’a pas surpris.
Ce qui ne cesse de m’interroger, c’est la récurrence de la prison dans le parcours de Prigojine. Jeune adulte, il y passa plusieurs années pour des délits de droit commun. À partir de juin 2022, il sillonna les prisons russes pour recruter, parmi les détenus, des dizaines de milliers de soldats envoyés sur le front ukrainien. La roulette russe : une petite chance de gagner sa liberté, une grande probabilité d’y perdre la vie.
Le Monde écrit « les nouvelles recrues sont utilisées comme de la chair à canon, notamment durant la bataille de Bakhmout, et périssent par dizaines de milliers ».
Merci Xavier.