Je souhaite partager dans « transhumances » ce qui m’a étonné, dans ma vie personnelle comme dans l’actualité.
Dans cet article de transhumances, je mentionne un délicieux acte d’autodérision d’Alain Delon se glissant dans la peau d’un Jules César vieillissant ; je m’étonne de l’empathie à géométrie variable de BFMTV, qui semble s’émouvoir davantage du sort du chien d’Alain Delon et de touristes français bloqués à Madère que celui des Gazaouis écrasés sous les bombes ; et j’observe avec intérêt la reconversion d’anciennes prisons fermées aux Pays-Bas.
Autodérision
Dans « Astérix aux Jeux Olympiques » (2008), Alain Delon se prêtait à un délicieux exercice d’autodérision. César se contemple dans un miroir et commente son image :
César ne vieillit pas, il mûrit,
Ses cheveux ne blanchissent pas, ils s’illuminent,
César est immortel pour longtemps
César a tout réussi, tout conquis,
C’est un guépard, un Samouraï,
Il ne doit rien à personne,
Ni à Rocco, ni à ses frères, ni au Clan des Siciliens.
D’ailleurs, le César du meilleur empereur a été décerné… à César !
Ave moi !
Empathie sélective
Télérama a publié sur son site le 22 août 2024 une chronique de Samuel Gontier intitulée : « Chiens, touristes ou Gazaouis : BFMTV a la compassion sélective. »
La chaîne d’information s’est émue du sort de Loubo, le chien d’Alain Delon. L’acteur avait souhaité qu’il soit euthanasié à son décès, pour lui éviter d’être malheureux.
La chaîne évoque aussi le sort des touristes français bloqués par une tempête à l’aéroport de Madère. Une fin de vacances cauchemardesque pour eux, d’autant plus qu’ils ignorent s’ils seront remboursés de leurs frais.
Dans la même émission, une séquence est consacrée à la négociation d’un cessez-le-feu à Gaza. Jérôme Clech, consultant défense BFMTV, évoque le contexte du conflit Israël-Iran. « Ce qui reste en relations internationales, dit le consultant, c’est la loi du plus fort. Donc ce sera le plus fort qui imposera son emprise sur Gaza (…) Il faut être cynique, on ne peut avoir qu’une analyse cynique. » « J’ai failli croire, écrit Samuel Gontier, que le cynisme consistait à ne pas dire un seul mot du sort des Gazaouis en dix-neuf minutes d’une « analyse » consacrée à un cessez-le-feu à Gaza. »
Et le chroniqueur de conclure : « Ouf, j’imagine déjà la joie à Gaza. Les habitants vont pouvoir fêter le rétablissement des liaisons avec Madère – et l’heureux dénouement du drame de Loubo. »
La nouvelle vie d’anciennes prisons aux Pays-Bas
Le magazine en ligne Slate a consacré en juin 2024 un article à la fermeture de prisons aux Pays-Bas et à leur reconversion : « faute de détenus, les prisons s’inventent une nouvelle vie. »
« Depuis plusieurs années, lit-on dans cet article, les prisons néerlandaises se vident, faute de détenus. Alors qu’ils étaient 20.000 en 2004, ils ne sont plus que 9 415 aujourd’hui (…) Les Pays-Bas ont fermé vingt-trois prisons entre 2015 et 2020.
Cette évolution, inverse à la surenchère carcérale observée en France, tient à trois raisons : des peines de prison plus courtes aux Pays-Bas qu’en France (5,1 mois de détention en moyenne contre 11,1 en France) ; une priorité donnée par les juges à la réinsertion plutôt que l’incarcération ; et une baisse de la petite et moyenne délinquance, preuve que l’amélioration de la sécurité des citoyens ne passe pas par une répression accrue.
L’article cite la transformation de la prison de Haarlem. « Ouverte de 1901 à 2016, elle a été réhabilitée en 2022 en un complexe de 1.000 mètres carrés, baptisé «le Dôme» (De Koepel en néerlandais), mêlant des bureaux, une université, un cinéma ou encore un café. Une tendance loin d’être nouvelle dans le pays. »