Passer un long weekend dans le Périgord noir permet au touriste de se laisser envelopper par une terre de douceur, d’harmonie et de passé immémorial.
À Périgueux, c’est la gentillesse des gens qui nous surprend. Sur la place du marché, une vendeuse de fruits et légumes nous offre de garder nos achats pendant que nous visitons la cathédrale. Nous lui amenons notre fromage, notre charcuterie ; elle nous accueille avec le sourire et nous offre un sac à provisions.
Le quartier médiéval de Périgueux est pour l’essentiel livré aux piétons. Comme le centre-ville de Sarlat, il est paisible et harmonieux. La cathédrale Saint-Front a été reconstruite au dix-neuvième siècle selon l’image que les architectes de l’époque se faisaient du Moyen-Âge. Les petits dômes à colonnettes ont été copiés pour le Sacré-Cœur de Montmartre. L’impression d’ensemble est étrange, mais pas désagréable.
Nous visitons les jardins d’Eyrignac en fin d’après-midi, avec un soleil oblique qui souligne les contrastes. C’est un haut lieu de « l’art tropiaire », qui consiste à tailler des arbres et arbustes pour créer de véritables sculptures végétales. Nous admirons la quantité de travail que supposent ces sculptures et l’entretien au cordeau des pelouses et des massifs de fleurs. Nous goûtons un moment de sérénité.
Nous séjournons dans un hôtel de charme, le Moulin de la Beune aux Eyzies de Tayac qui présente toutes les qualités : un cadre idyllique, un personnel souriant, un excellent rapport qualité – prix. Le second jour, le temps étant à la pluie, nous optons pour un programme préhistorique. Le lieu n’a pas été choisi au hasard : il n’existe pas moins de 37 sites préhistoriques dans les environs des Eyzies, la plupart consistant en grottes et cavernes creusées dans les falaises par la Vézère.
Nous nous rendons à Montignac pour visiter Lascaux 2, le fac-simile de la grotte de Lascaux ouvert en 1983. Dans quelques mois sera ouvert Lascaux 4, qui utilisera les techniques les plus modernes pour immerger le visiteur dans une époque vielle de 17.000 ans. Pour obliger le visiteur à stationner dans le centre-ville, la municipalité de Montignac y a placé la billetterie. Comme des travaux de voierie sont en cours, le chaos s’est installé et l’achat du billet relève du parcours du combattant. Pour ne rien arranger, l’imprimante de billets est en panne. Elle semble hors d’âge, préhistorique en quelque sorte : « c’est cohérent », commente un ami.
Nous sommes agacés de ce piétinement inutile et glacés par le temps froid et pluvieux. Mais lorsque nous pénétrons dans le site, conduits par une guide compétente, c’est un émerveillement. Il y a dix-sept mille ans, des artistes ont su créer un univers magique à partir de la représentation des animaux, chevaux ou taureaux, qu’ils chassaient. « La Chapelle Sixtine de la préhistoire », disait l’Abbé Breuil, qui étudia le premier ce lieu exceptionnel découvert en 1940 par de jeunes paysans.
Aux Eyzies de Tayac, le musée de la préhistoire est décevant. Priorité a été donnée à la présentation d’un maximum d’objets, ce qui rebute le non-spécialiste. J’ai néanmoins aimé une série de vidéos montrant un artisan taillant des objets avec les outils à la disposition des hommes à différents moments de l’évolution de l’humanité. J’ai aussi été impressionné par la courbe des températures au long de milliers d’années. La température moyenne annuelle à Périgueux est actuellement de 12°C ; nos ancêtres eurent à vivre à des périodes où elle était de 6°C, avec des minimas à -22°C.
Tout près des Eyzies, la forteresse médiévale de Commarque mérite le détour. Du parking, on y accède par un chemin en forêt qui, après 1km environ, débouche sur une grande clairière. Deux châteaux se font face, celui de Commarque à gauche, celui de Laussel au fond du vallon. Des habitations troglodytes, en bas de la falaise, attestent d’un mode d’habitat très enraciné dans l’histoire de la région. Un petit chat a accompagné ma descente du donjon à la plaine ; son pelage était couleur de pierre.
Partant des Eyzies, un joli circuit pédestre de 3 heures permet de découvrir une variété de paysages. Elle s’intitule « boucle de la gorge d’enfer » et part du parking de la Vézère. Elle longe la rivière et les falaises, puis emmène le randonneur dans la campagne avec des vallons parfois plantés de noyers, une spécialité locale.
Le village de Beynac-et-Cazenac, au bord de la Dordogne, occupe un site fortifié impressionnant, d’où l’on voit trois châteaux. La promenade en gabarre sur la rivière est particulièrement agréable.
Nous achevons ce weekend par une bastide du treizième siècle, Monpazier. Déguster une bière à la terrasse d’un des cafés occupant la place centrale entourée d’harmonieuses arcades. Il est vrai que ce Périgord n’est plus noir, mais pourpre.