« Histoires de femmes » (Robert Laffont, 2022) est un livre collectif sous la direction de Lisette Lombé, Elvira Masson, Fabrice Rose et Delphine de Vigan. Il résulte de huit ateliers d’écriture organisés à l’été 2021 au centre de détention pour femmes de Roanne sous l’égide de l’association Lire pour en sortir.
Delphine de Vigan affirme qu’écrire constitue un acte de liberté. « En prison comme ailleurs, écrire implique de fabriquer, de préserver, un espace à soi. Pour soi. » C’est un acte de liberté. Si les ateliers commencent par des exercices ludiques, « j’essaie de montrer, dit-elle, l’utilité du cadre, de la contrainte, de la consigne, autant de termes que j’utilise habituellement sans scrupules, mais qui résonnent de manière plus risquée en prison. »
Les techniques utilisées dans un atelier d’écriture sont diverses. On peut inciter les participantes à enchaîner à partir de quelques mots : qui suis-je ? Quand j’étais petite… J’ai l’air… On peut leur demander de se décrire à partir d’une photo. On peut leur proposer de dire ce qu’inspire le poème « liberté j’écris ton nom » d’Éluard ou une chanson de Léo Ferré. On peut aussi leur demander d’écrire des recettes de cuisine qu’elles réalisent en prison.
Beaucoup de textes expriment une détresse déchirante. « Quand j’étais petite (…) Je voulais sauver le monde, me voyais dans la peau des héroïnes qu’on voyait dans les films. Et ce monde, je l’ai aidé. Mais à se dégrader. Comme je me suis dégradée moi aussi. » Et aussi : « hier, je faisais partie d’un monde, de la vie… tout à coup j’ai disparu, sans laisser de trace, comme un courant d’air. » Ou encore : « nous sommes ces lumières tapies dans l’ombre fracassée par le temps., nous marchons en béquille, le maquillage pour cacher nos blessures. »
Les participantes expriment pourtant leur espérance en un avenir meilleur. L’une d’entre elles dit aimer « l’aube qui ferme la nuit et ouvre le jour. L’aube qui renvoie chez eux les amoureux incertains. L’aube qui donne l’espoir à une vie nouvelle. » Et aussi : « Je sais que tu n’arrives pas à te pardonner, mais tu dois y croire et t’accrocher, t’accrocher à la vie. » Et enfin, à partir de la chanson de Léo Ferré : « Avec le temps va, tout s’en va, heureusement qu’avec le temps, va, tout s’en va, cela laisse la place à quelque chose de nouveau… non ? Et même si le monde ne veut pas de nous, moi, je veux le monde entier. »