Je suis toujours là

« Je suis toujours là » (Ainda estou aqui), film du Brésilien Walter Salles, est inspiré du livre de Marcelo Rubens Paiva, relatant la vie de sa mère Eunice Paiva (1929-2018), qui fut un symbole de la lutte contre la dictature militaire qui s’imposa au Brésil de 1964 à 1985.

Le film commence par des images de la vie heureuse de Rubens Paiva (Selton Mello), architecte et ancien député, et de son épouse Eunice (Fernanda Torres), avec leurs cinq enfants, Veroca, Eliana, Naïu, Marcelo, Babiu. Ils habitent une grande maison près de la page de Rio de Janeiro et leur vie est faite de baignades, de jeux de ballon et de rires.

Un jour, en 1971, Rubens est emmené pour un interrogatoire. Deux policiers, qui se déclarent « parapsychologues » s’installent dans la maison. Rubens ne revient pas. On finit par emmener Eunice et Eliana. Eliana est enfermée dans un cachot sordide, où les bruits sont ceux des prisonniers qui hurlent sous la torture. On lui montre, encore et encore, des photos de « terroristes » présumés, dont celle de son mari, et on la presse de les dénoncer.

De retour chez elle, Eunice prend une longue douche pour effacer les traces de ce cauchemar. Mais le cauchemar continue avec l’absence prolongée de Rubens. Comme chef de famille, il détenait seul le pouvoir sur le compte bancaire.

Eunice emmène les enfants à São Paulo pour changer de vie. Elle-même reprendra des études d’avocate. Elle mènera un combat en faveur des droits des peuples indigènes et pour que soient reconnus les crimes de la dictature. « Le gouvernement n’a-t-il pas mieux à faire que de faire resurgir le passé ? », lui demande un journaliste. « Non », répond-elle simplement.

Eunice sait par des rumeurs que Rubens avait des activités militantes et avait été assassiné par les militaires. Le couronnement de son combat, en 1988, est d’obtenir de l’administration son certificat de décès. Elle souligne le paradoxe : sa plus grande joie est de voir écrite noir sur blanc la mort de l’amour de sa vie.

« Je suis toujours là » est un grand film, porté par une intensité dramatique du début à la fin, par des trouvailles comme l’utilisation de la caméra super-8 de l’une des filles pour évoquer des scènes du passé, et par l’interprétation formidable de Fernanda Torres, récompensée par le Golden Globe.

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