Un bâtiment au bord de la Vltava abrite un musée dédié à Franz Kafka, dont le génie naquit de l’impossibilité à s’assumer a la fois comme Juif, Tchèque et Allemand, les trois communautés qui coexistèrent à Prague pendant des siècles, jusqu’à la mise en œuvre de la « solution finale ».
Le musée contient tout ce qu’on peut attendre d’un lieu de mémoire littéraire : des photos, des citations, des manuscrits (en particulier, celui de la « lettre au père »), des éditions originales. Mais il a aussi l’ambition de nous faire vivre une expérience kafkaïenne. On parcourt un long couloir obscur aux parois duquel s’appuient des casiers administratifs aux noms d’employés fantômes, dont « K » et « Joseph K », le héros du Château. Des casiers ouverts présentent des extraits du Château et du Procès.
Plus loin, des vitrines suspendues évoquent les femmes que Kafka aima. Cette représentation sonne juste : aucune de ces relations n’a vraiment pris racine, si ce n’est sans doute celle avec Dora qui accompagna le fonctionnaire écrivain jusqu’au bout de ses années d’agonie.
Kafka, tel une ombre sans identité, ou accablée par trop d’identités, vient habiter nos songes.
Photo « transhumances » : statue de Franz Kafka près de la synagogue espagnole.