La Daronne, film de Jean-Paul Salomé d’après le roman d’Hannelore Cayre, avec Isabelle Huppert dans le rôle principal, réussit le pari d’allier les genres « comédie » et « policier ».
Patience Portefeux (Isabelle Huppert) travaille comme interprète judiciaire français-arabe à la brigade des stupéfiants. Son travail : traduire les conversations entre dealers écoutées par son service, participer aux interrogatoires. Veuve depuis vingt ans, elle élève seule ses deux filles. Elle habite dans le quartier de Belleville, dans un immeuble dont elle est la seule occupante non chinoise.
La mère de Patience (jouée par Liliane Rovère) est en fin de vie dans un Ehpad. Issue d’une famille miséreuse de pieds-noirs, elle rêve de luxe et de Galeries Lafayette. C’est par les petits trafics qu’elle s’est hissée au rang de petite bourgeoise. Le mari de Patience était lui-même un petit délinquant et un flambeur.
Patience est accablée de dettes. Lorsque, dans une session d’écoute, elle découvre que Khadîdja (Farida Ouchani), la dévouée infirmière de sa mère, est impliquée par son fils dans un gigantesque trafic de drogue, elle décide de mettre la main sur la marchandise en route vers Paris. Elle poursuit deux buts : aider Khadîdja, qui rend moins difficile la vie de sa mère ; liquider ses dettes.
Elle se transforme en gros bonnet du trafic de stupéfiant, que l’on surnomme « La Daronne ». Elle s’habille en femme d’affaires maghrébine ultra-chic. Elle fixe rendez-vous à Scotch (Rachid Guallaz), un petit dealer, dans un palace parisien. Une féconde collaboration s’instaure, dans laquelle elle fait preuve d’un impressionnant professionnalisme.
Il faut écouler des centaines de milliers d’euros, fruits du trafic. C’est à Madame Fo (Jade-Nadja Nguyen), la propriétaire de la quasi-totalité de son immeuble, qu’elle s’adresse : une connexion s’établit ainsi entre les réseaux arabes et chinois ! La négociation entre Patience et Madame Fo dans un jardin public de Ménilmontant est un très bon moment du film.
L’amant de Patience n’est autre que Philippe, le commandant de son groupe à la brigade des Stupéfiants. Peu à peu, il se met à deviner que Patience et la Daronne pourraient avoir beaucoup en commun…
« La Daronne » est un excellent film. Il y a une vraie intrigue policière, et un suspens qui va croissant : la double vie de Patience sera-t-elle découverte ? Il s’agit aussi d’une comédie divertissante, où les clichés sur les Arabes et les Chinois sont poussés à un tel degré qu’ils ne peuvent être pris au sérieux et déclenchent un rire sans malentendu. Le milieu des dealers, leur langage, sont bien documentés. La performance d’Isabelle Huppert, qui a appris par cœur phonétiquement ses répliques en arabe, est époustouflante.