La mer au loin

« La mer au loin », film de Saïd Hamich Benlarbi, constitue un puissant témoignage sur l’âpreté de l’exil pour des jeunes Maghrébins qui doivent trouver leur chemin de vie au milieu de mille embûches.

En 1990, le jeune Nour (Ayoub Gretaa), arrivé du Maroc clandestinement, vit à Marseille une vie plutôt heureuse, dans un groupe de jeunes Maghrébins qui dansent, chantent le Raï, dorment chez les uns ou les autres, vivent de chapardages. Lorsque Khaled, le chef de bande, se marie, et lorsque la police fait une descente, tout change. J’ai vieilli de dix ans en trois mois, dit Nour.

Un policier, Serge (Grégoire Colin) se prend d’affection pour le jeune délinquant – affection non exempte de motivation car on le découvre bisexuel – marié et père de famille à la maison, amateur de jeunes garçons dans des clubs le soir. Avec l’accord de la femme de Serge, Noémie (Anna Mouglalis), Nour s’installe dans leur vie. Lorsque Serge meurt du Sida, il se trouve face à face avec Noémie et le fils de celle-ci.

Le couple formé par Noémie et Nour est soumis à rude épreuve : les injures racistes, le reproche de lâcheté que Noémie adresse à son nouveau mari qui ne réagit pas, l’ostracisme de la famille de Serge à l’égard de l’intrus arabe, la jalousie de Nour qui ne supporte pas lia liberté des mœurs de Noémie, tout cela les mène au bord de la rupture. Nour retourne dans sa famille au Maroc, mais il se heurte à un mur d’hostilité de la part de sa mère (Fatima Attif), qui lui reproche d’avoir épousé une chrétienne plus âgée que lui : la mère au loin… Il retrouve aussi Fadela, une amie de jeunesse mais elle ne reviendra pas à Marseille.

Dix ans ont passé. Nour retrouve Houcine (Omar Boulakirba), devenu ouvrier agricole. « Tu as de la chance, au moins toi tu vis dans la dignité, moi je vis la tête baissée. » Houcine est transporté dans la benne du pick-up, le chien dans la cabine à côté de son maître.

« La mer au loin » nous fait ressentir la douleur de l’exil. Le personnage principal, Nour, n’est pas maître de son destin. Il est confronté à des contraintes, dont la principale est la condition de sans-papier. Il est l’objet du désir d’autrui, Serge, Noémie, et du rejet de personnes aimées, et d’abord sa mère. Saïd Hamich Benlarbi explique avoir choisi Ayoub Gretaa pour le rôle de Nour en raison de sa capacité à faire siennes les émotions de ceux qui l’entourent, passant du rire aux larmes au gré de leurs humeurs. Il se dégage du film une impression de flottement – flottement qui caractérise peut-être la condition d’immigré.

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