A Bordeaux, le musée du vin et du négoce est installé au cœur du quartier des Chartrons, consacré depuis toujours à cette activité.
Installé en 2007, le musée est consacré à l’activité commerciale du vin et non à celle des propriétaires. Il occupe un immeuble construit vers 1720 par le négociant irlandais Francis Burke dans le faubourg des Chartrons, alors situé au nord du Château Trompette qui surveillait le centre ville, dont le site est maintenant occupé par la Place des Quinconces. Les Chartrons doivent leur nom à un couvent de Chartreux construit dès le quatorzième siècle dans une zone jusque là marécageuse.
L’exposition occupe deux caves dans lesquelles furent entreposées pendant plus de deux siècles des barriques de vin.
Le musée se focalise sur l’activité du négociant. Celui-ci ne se contente pas de mettre en contact les propriétaires de domaine avec les acheteurs, souvent situés à l’étranger et en particulier en Grande Bretagne. Il crée des marques et prend à sa charge les processus d’assemblage de cépages différents et de vieillissement qui garantissent une qualité égale. Ce sont les négociants qui sont à l’origine du classement des grands crus, d’abord le Médoc et le Sauternes en 1855, puis Graves et Saint-Emilion un siècle plus tard.
Ce sont eux aussi qui se sont convertis au dix-neuvième siècle à l’embouteillage. C’est ce nouveau conditionnement, venu d’Angleterre, qui signa la fin des Chartrons comme quartier du vin. Les rues étroites perpendiculaires du quartier convenaient bien au passage de charrettes transportant des barriques ; elles constituèrent un obstacle au développement du négoce lorsqu’il s’agit de transporter en camions des palettes de bouteilles. Les grandes surfaces libérées par les négociants furent occupées par des écoles de commerce et des antiquaires qui tendent, depuis quelques années, à rajeunir et à embourgeoiser le quartier.
Dans une salle du musée, un film analyse en détail le tableau du peintre bordelais Pierre Lacour intitulé « la vue d’une partie du port et des quais de Bordeaux dits des Chartrons et Bacalan », de 1804. De nombreux navires sont amarrés à l’ancre au milieu de la Garonne ; des barges à fond ramènent au bord les marchandises. Il n’y a pas de quai au sens strict, mais une berge qui descend en pente douce. La manipulation des charges se fait sur des planches en bois. Sur la terre ferme, des négociants surveillent les opérations. Le blog Diacritiques à consacré à ce tableau un intéressant article.
La visite au musée se termine par la dégustation d’un vin blanc et d’un vin rouge. C’est à une ravissante stagiaire chinoise qu’il est revenu de me faire goûter ce produit si régional. Il faut dire que plusieurs domaines ont été achetés par des Chinois ces dernières années, et que leurs connaissances en œnologie, comme en d’autres technologies, progressent à pas de géant.