Le Roman d’un Trader

France 2 a récemment diffusé « Le Roman d’un trader », une pièce de Jean-Louis Bauer mise en scène par Daniel Benoin.

 J’avais été passionné à Londres par deux pièces consacrées aux dérives de l’économie financière. « The Power of Yes » de David Hare expliquait les mécanismes de la crise financière de 2008 ; « Enron » de Lucy Prebble montrait l’incroyable dérive de spéculateurs sans foi ni loi. L’une et l’autre avaient une ambition pédagogique : il s’agissait de faire comprendre des faits de société en s’appuyant sur la technique théâtrale.

 Dans « Le Roman d’un Trader », l’affaire Kerviel est seulement un prétexte. France 2 a très justement classé la diffusion de la pièce dans la rubrique « divertissement ».

 Le cadavre d’un homme gît aux pieds du gratte-ciel occupé par une banque. Le fantôme de cet homme surgit de sous terre. L’homme est un trader (Lorànt Deutsch). Ses opérations hasardeuses ont fait perdre à la banque 55 milliards d’euros et la mettent virtuellement en faillte. Son fantôme, transparent pour ceux qu’il côtoie,  va revivre le week-end fatidique où elles ont été découvertes. Il va tenter de faire revenir le trader à son ordinateur de travail pour qu’il compense la perte de la banque et, ce faisant, sauve sa peau. Heure par heure, il assiste aux péripéties d’un drame dont les personnages sont le directeur général (Tcheky Karyo), un chef de cabinet aussi véreux qu’ambitieux (Paulo Correia), la femme du directeur général, son avocate et le Gouverneur de la Banque de France.

 Le Gouverneur de la Banque de France est d’accord pour renflouer la banque si le directeur général lui abandonne sa femme. L’avocate, passionnée de chiens, fait aboyer le chef de cabinet. Le trader, de retour à Paris, veut bien déclencher une spéculation mondiale à la hausse sur l’euro qui effacera les 55 milliards perdus dans une spéculation en sens contraire à condition que le directeur général lui avoue qu’il l’aime et l’admire. Le chef de cabinet n’a pour guide que l’ambition. Le Gouverneur de la Banque de France n’est mu que par son désir de rafler la femme de son rival.

 On sent bien que ces situations outrageusement schématiques ont pour but de faire rire. Mais elles sont si remplies de clichés et de préjugés, qu’elles tombent la plupart du temps à plat. La pièce a quelque mérite par cette invention du fantôme transparent qui tente d’interagir avec les vivants. Il fait le lien entre le présent et un passé qui aurait pu exister, de même que dans l’économie financière, le capital fait le lien entre le présent et un futur dessiné par l’investissement. La scène où il parvient à se faire voir sur les écrans d’ordinateur, mais avec une image brouillée et sans le son, est l’un des meilleurs moments de la pièce.

 Mais dans l’ensemble »le roman d’un trader » est décevant. Il manque un équivalent français du Power of Yes et d’Enron.

Tchéky Karyo et Lorànt Deutsch dans "Le Roman d'un Trader"
Tchéky Karyo et Lorànt Deutsch dans « Le Roman d’un Trader »

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