Dans « Les Saisons », Jacques Perrin et Jacques Cluzaud proposent une belle méditation sur les relations de l’homme et du monde animal.
L’argument du film est simple. Après la fin de la glaciation, l’Europe s’est couverte d’une forêt dense où les animaux vivaient dans une totale liberté.
Au fil des millénaires, l’homme s’y est insinué, animal malgré d’autres, seulement doté du feu, de l’arc et des flèches. Peu à peu, il domestiqua des animaux, défricha les forêts, créa la campagne. Les grands mammifères durent se réfugier dans les montagnes. Puis l’homme prétendit asservir la nature et par ses machines atteint une force géologique, capable de transformer les paysages. La pollution générée par ses industries détruit la forêt. Mais il est temps encore de sceller une nouvelle alliance entre l’homme et l’animal.
En soi, cela est banal. Ce qui ne l’est pas, c’est le soin apporté au cadrage, au contraste, à la couleur de chaque image, chacune constituant une œuvre d’art. Ce sont les prouesses techniques permettant voler aux côtés d’oies sauvages ou de s’immiscer dans le terrier de renardeaux. C’est le travail sur le son, par lequel le bruit du vent, les cris des bêtes, le crissement de leurs pas sur le sol, le choc de leurs affrontements au corps à corps sont isolés, purifiés, amplifiés. C’est le montage qui crée une sorte de scénario dans lequel les espèces s’épient mutuellement : la chouette observe le loup qui guette la biche qu’il va attaquer.
Le spectateur est fasciné par tant de beauté. Il n’y a pas de naïveté dans le film de Perrin et Cluzaud. La forêt primitive est un monde cruel ; les animaux s’y entretuent d’un maillon à l’autre de la chaine alimentaire. Comme l’avaient bien vu William Morris et le mouvement Arts and Craft, confrontés aux ravages de la révolution industrielle en Angleterre au dix-neuvième siècle, c’est la beauté, celle que l’on reçoit de la nature et celle que produit la création artistique, qui est en cause.
C’est la beauté animale que « Les Saisons » nous invite à admirer sans réserve. Puisse la nouvelle alliance entre l’homme et l’animal se nouer, pendant qu’il est temps.