L’Espagne dans le doute

L’élimination de l’équipe d’Espagne de la Coupe du Monde de football a coïncidé avec l’abdication du roi Juan Carlos : elle reflète l’image d’un pays qui doute de lui-même.

 Je ne suis pas un passionné de football. C’est pourtant avec passion que j’ai suivi les matchs de l’équipe d’Espagne contre la Hollande (1-5) et contre le Chili (0-2). Il y avait dans ces deux matchs une forte intensité dramatique.

Iker Casillas en proie au doute
Iker Casillas en proie au doute

D’un côté, une équipe espagnole qui avait dominé le football mondial pendant plusieurs années ; une équipe dont plusieurs joueurs ont participé à la finale de la coupe d’Europe des clubs il y a quelques semaines. De l’autre, deux équipes affamées de succès et prêtes à tout donner pour l’obtenir.

 Dans les deux cas, le premier but de l’équipe adverse a semé le doute dans l’équipe espagnole : on court moins vite, les passes sont moins précises, on ne construit pas le jeu, on le subit. Face à la Hollande, l’effondrement du moral fut manifeste, jusqu’à prendre l’allure d’une déroute. La défaite contre le Chili fut digne, mais implacable.

 L’implosion de la glorieuse « Rioja » espagnole s’explique en grande partie par la difficulté à renouveler une équipe à qui tout a réussi : on ne change pas une équipe qui gagne. En France aussi, les lendemains de la coupe du monde de 1998 ont été pénibles.

 Mais il est difficile de ne pas voir dans la défaite de l’équipe d’Espagne un reflet des difficultés que traverse le pays. Sur le plan du football, les commentateurs font un lien entre l’échec de l’équipe nationale et les problèmes du club de Barcelone. Sur le plan politique, la montée de la revendication d’indépendance catalane met à mal l’unité de l’Espagne.

 La monarchie espagnole est ébranlée par les scandales, dans un contexte de crise économique profonde. Le roi Juan Carlos vient d’abdiquer, laissant sa fonction aux mains de son fils Felipe. L’Espagne traverse une période de doute : la constitution née de la transition postfranquiste est-elle encore adaptée ? Comment peut-on procurer du travail aux millions de chômeurs, des ouvriers du bâtiment aux jeunes diplômés ?

 Le peuple d’Espagne (on pourrait aussi dire les peuples) se caractérise par une formidable énergie dans tous les domaines. Il traverse, comme sa sélection nationale de football, une crise de confiance. Je ne doute pas, pour ma part, qu’il saura trouver sa voie.

Juan Carlos abdique en faveur de son fils Felipe
Juan Carlos abdique en faveur de son fils Felipe

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