Arte TV a récemment diffusé Léviathan, film de Andreï Zviaguintsev (2014), cinéaste russe dont un autre film est cette année en compétition à Cannes.
Kolia, son fils Roma et sa seconde femme Lilya habitent une maison avec une vue superbe sur la mer de Barents. Des carcasses de baleines sont échouées sur la grève : d’emblée, le cinéaste évoque un univers de glaciation et de mort.
La mort est présente dans les relations exécrables entre les trois personnages. Roma hait sa belle-mère, n’accepte pas son autorité et la rembarre avec des mots injurieux. Elle rôde aussi dans la procédure d’expatriation de leur maison, où Kolia a grandi et qui abrite aussi son atelier de mécanique automobile.
Un ami de jeunesse de Kolia, Dmitri, est avocat. Il vient à leur secours, afin d’obtenir du maire mafieux Vadim Cheleviat, qu’il paie un dédommagement cinq fois supérieur à celui que la juge, qui est à sa dévotion, lui a reconnu. Dmitri détient des éléments compromettants pour le maire, démontrant qu’il a du sang sur les mains. Le chantage fonctionne. Le maire est prêt à payer.
Mais le destin est implacable pour Kolia, comme il le fut pour Job dans la Bible. Dmitri devient l’amant de Lilya. Le mari trompé se saoule à la vodka, agresse physiquement son ancien ami, menace de mort son épouse infidèle et la viole. Lilya se suicide en se jetant dans la mer. Pour pouvoir adopter Roma et toucher ainsi une allocation, un couple d’amis de Kolia l’accusent d’avoir assassiné sa femme. Kolia est reconnu coupable de meurtre et condamné à quinze ans de prison à régime sévère.
Un évêque soutient résolument Cheleviat, le politicien pourri, en affirmant que s’il est au pouvoir, c’est que Dieu l’a voulu, et que Dieu est content de son action. Un prêtre conseille à Kolia d’accepter son sort, comme Job avait accepté sa disgrâce.
Une scène poignante du film est celle où les bulldozers arrachent des lambeaux de la maison jusqu’à la faire s’effondrer. Ce qui sera bâti à son emplacement, ce sera une église.
« Léviathan » a obtenu le prix du scénario à Cannes en 2014. Je ne l’ai pas trouvé vraiment convainquant. Les rôles me semblent surjoués, même si le réalisateur assure que les personnages mis en scène existent dans la réalité russe. Par contre, l’ambiance du film, créée par des images sombres et fortement contrastées et une musique poignante, en font une œuvre remarquable.