L’Université Montaigne reçoit un poète arabe

L’Université Montaigne de Bordeaux a invité en décembre le poète marocain Mohammed Bennis, qui s’est exprimé sur la poésie et a récité ses poèmes.

 Né à Fès en 1948, Mohammed Bennis enseigne la littérature arabe moderne et contemporaine à l’université Mohammed V de Rabat. Il est l’un des promoteurs de la modernité culturelle au Maroc, de la poésie en particulier. Plusieurs de ses recueils de poésie ont été publiés en français : citons parmi d’autres « le don du vide », « le livre de l’amour », « lieu païen », « fleuve entre des funérailles ».

Mohammed Bennis
Mohammed Bennis

La langue de pensée et d’écriture de Mohammed Bennis est l’arabe. Mais étant aussi parfaitement francophone, il cherche à construire des passerelles entre les univers poétiques des langues française et arabe. De l’arabe vers le français, il travaille en coopération avec un poète français, Bernard Noël ; du français vers l’arabe, il est un spécialiste reconnu de Stéphane Mallarmé, dont il a traduit le poème « un coup de dés jamais n’abolira le hasard. »

 Invité par l’Université Bordeaux Montaigne, il a animé un atelier avec des étudiants de langue et civilisation arabes. Mohammed Bennis considère que c’est par sa langue que se définit la culture d’un peuple. La langue est essentielle, centrale dans la définition de l’identité d’une nation. Et le poète est placé dans la position du veilleur, celui qui, par sa propre production, établit un étalon de l’intégrité de la langue.

 Produire du langage est une âpre tâche. Le poète donne aux mots leur poids, leur parfum, leur tonalité propre aux côtés d’autres mots qui ensemble confèrent au poème sa musicalité et son rythme. Ces mots sont parfois banaux, et ils prennent dans leur contexte une couleur différente ; ils sont parfois anciens ou même désuets, et le poète leur insuffle une nouvelle jeunesse. Un poème réussi puise dans un large patrimoine linguistique ; il ne prend forme qu’au terme d’un travail acharné.

 Traduire, on le sait, peut signifier trahir. Chaque langue a son génie. Nul traducteur automatique ne pourrait transférer un poème du français à l’arabe ou vice-versa. Le poète traducteur travaille sur un fil, entre l’exigence de rester fidèle au texte et celle de le rendre sensible aux lecteurs étrangers imprégnés de leurs propres références culturelles.

 Les étudiants furent invités à une lecture de ses poèmes en arabe par Mohammed Bennis lui-même. On sait que la poésie est l’art par excellence de la culture arabe. Cet après-midi de poésie le démontra pleinement, mais donna aussi à entendre une écriture inventive, en prose, libérée des carcans formels de l’époque classique.

 L’arabe est une langue habitée de musicalité et de rythme. Comme les autres langues sémitiques, elle est construite sur l’assemblage de consonnes et l’alternance de voyelles brèves et longues. Certaines claquent dans les dents comme des percussions, d’autres rendent une sonorité sourde, d’autres encore meurent longuement dans la bouche. Des morceaux de luth ponctuaient certains poèmes, prolongeant dans le silence les arpèges des poésies de Mohammed Bennis.

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