« La France incarcère davantage depuis vingt ans alors que l’on n’assiste pas à une telle hausse de la délinquance » lit-on dans le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur les dysfonctionnements et les manquements de la politique pénitentiaire française publié le 12 janvier 2022.
« En vingt ans, lit-on dans le rapport, le nombre de personnes écrouées détenues a augmenté de 31,5 %, passant de près de 48 000 au 1er janvier 2001 à près de 70 000 à la fin de l’année 2021. Augmentation absolue du nombre de personnes détenues, cette hausse est également relative : en effet, le nombre de personnes détenues pour 100 000 habitants est passé de 78,5 en 2001 à 103,6 à la fin de l’année 2021. »
Il est tentant d’imputer cette croissance à une augmentation de la criminalité. Or, ce n’est pas ce que nous disent les chiffres.
Le rapport parlementaire cite l’Observatoire International des Prisons : « Les analyses de l’Observatoire scientifique du crime et de la justice (OSCJ) tirées de données policières et sanitaires témoignent même d’une tendance à la baisse de divers types d’infractions, comme les vols de véhicules et les cambriolages qui diminuent depuis deux décennies ou encore les homicides qui se situent à un niveau très bas (0,013 décès pour 1 000 habitants). Les vols avec armes diminuent en outre sensiblement depuis dix ans (16 100 enregistrés en 2009, 7 600 en 2019). Quant aux agressions physiques non létales, elles sont restées globalement stables sur la période, avec néanmoins une augmentation récente. Même chose concernant les violences sexuelles. On ne note une hausse significative des dépôts de plainte que depuis fin 2016 »
Le rapport cite Jean-Marie Delarue, ancien contrôleur général des lieux de privation de liberté : « Il faut se défaire résolument de l’idée commune selon laquelle les effectifs de personnes emprisonnées sont liés à l’état de délinquance du pays ».
Il conviendra d’analyser les causes de cette discordance entre criminalité et emprisonnement : disposition accrue des victimes à porter plainte ? Plus grande sévérité des juges (que l’on accuse souvent de laxisme) ? Peines encourues et délais de prescription plus longs ? Plus grande incidence de certains types d’infractions, telles que le trafic de drogues ?