À l’occasion du deuxième centenaire de la mort de Napoléon Bonaparte à l’île de Sainte-Hélène, Arte TV a récemment diffusé un documentaire de Mathieu Schwartz, « Napoléon, la destinée et la mort ».
Comme l’indique le titre du film, le fil conducteur de cette biographie est le rapport paradoxal de Napoléon avec la mort. Il semble parfois la provoquer, jouer aux dés avec elle. Sur le Pont d’Arcole, en Italie (1796), il s’avance à la tête de ses troupes et ne doit la vie qu’à son aide de camp qui le protège de son corps. Au bord du lac de Laffrey (1815) pendant l’épisode des cent-jours, il s’avance poitrine découverte au-devant des soldats royalistes venus l’arrêter ou le tuer
Il ne redoute pas la mort car il croit en son destin. Il est convaincu qu’il ne mourra pas avant d’avoir accompli de grandes choses. Il se construit une image d’invincibilité et d’immortalité. Lorsque des députés le bousculent, le 9 novembre 1799, il fait croire qu’ils l’ont agressé au couteau, comme l’avait été Jules César, mais qu’ils ne pouvaient l’atteindre. Quelques mois plus tard, une charrette piégée explose quelques secondes après le passage de son carrosse : il en réchappe miraculeusement et vante sa bonne étoile.
Lorsqu’en 1809 un jeune nationaliste allemand, Frederic Staps, tente de l’assassiner au couteau au château de Schönbrunn, à Vienne, Napoléon ne comprend pas. Il convoque le jeune terroriste et un dialogue de sourds s’instaure. L’empereur est convaincu d’apporter à l’Europe les bienfaits de la révolution française ; Staps dénonce l’oppression et refuse de demander sa grâce. Napoléon prend conscience de sa fragilité, décide d’avoir l’héritier que sa femme Joséphine ne peut lui donner, divorce et se remarie.
En 1814, contraint d’abdiquer en raison de sa défaite, l’empereur tente de se suicider en avalant du poison. Il entend maîtriser la fin de sa vie, mais la mort ne veut pas de lui.
De 1815 au 5 mai 1821, à Sainte-Hélène, il travaille pour sa postérité. Il bataille avec le gouverneur anglais, pour laisser le souvenir d’un combattant. Il vit sa longue agonie comme une lutte à mort, et dicte son testament dans les moindres détails. « Vivant, il a manqué le monde, mort il le possède » dit de lui Chateaubriand.
Le film de Mathieu Schwartz alterne des images d’archives, des apports d’historiens et des scènes filmées dont le personnage est flouté comme un héros de bande dessinée. C’est une réussite.