Nul homme n’est une île

Dans le cadre du Festival International du Film de Bordeaux, FIBIB, a été diffusé le film documentaire « nul homme n’est une île » réalisé par Dominique Marchais en 2017.

Le film emmène le spectateur en Sicile, en Autriche et en Suisse à la rencontre de pionniers qui expérimentent de nouvelles manières de vivre en société, en harmonie avec la nature.

La première scène de « Nul homme n’est une île » a pour cadre la Salle des Neuf à Sienne. La caméra explore la fresque « Allégorie des effets du bon et du mauvais gouvernement », peinte par Ambrogio Lorenzetti en 1338 et 1339.  Au milieu de la pièce, une fresque représente une ville heureuse, laborieuse, harmonieusement intégrée dans la campagne environnante.

Sur le mur de gauche, sont représentées des scènes de désolation : armes, guerre, massacres, inévitables lorsque les gouvernants sont des tyrans assoiffés de richesses et de pouvoir. À droite figure une allégorie du bon gouvernement, choisi par des citoyens égaux, au service du bien commun. C’est la recherche de communautés humaines qui se sont dotées d’un « bon gouvernement » que propose Dominique Marchais au spectateur de son film.

La première de ces communautés est la coopérative agricole « Galline felici », au pied de l’Etna, en Sicile. « Les poules heureuses » picorent dans un verger d’orangers après une vie à dépérir en batterie. Les agriculteurs se sont organisés pour vendre en circuit court, obtenant pour leurs oranges un prix qui rémunère dignement leur travail et celui d’employés dont certains sont des migrants. Ils vivent dans le bruit d’une autoroute et de l’aéroport de Catane, et ils repoussent obstinément les offres de promoteurs qui voudraient transformer leurs terrains en centres commerciaux.

En Suisse, dans les Grisons, un architecte s’est installé dans un petit village reculé. Il construit des maisons avec les matériaux du pays, principalement du bois, en s’appuyant sur le savoir-faire des artisans locaux, s’intégrant harmonieusement dans le paysage.

Dans le Vorarlberg autrichien, une commune s’est dotée d’un « bureau des questions du futur », dont la philosophie est de faire avec les gens. Un organisme social, dit son responsable, se comporte comme un organisme biologique : si vous mettez en place les conditions nécessaires, il se développe tout seul.

Le titre du film est emprunté à un poème de John Donne (1572 – 1631) :

No man is an island,

Entire of itself;

Every man is a piece of the continent,

A part of the main.

« Nul homme n’est une île, suffisant à lui-même. Chaque homme est un morceau du continent, une partie du plus grand ». Ce poème me touche alors que je constate une forte tendance au repli individualiste, chacun se retranchant dans sa zone de confort, convictions, réseau social, « suffisant à lui-même ».

Les pionniers présentés dans le film se retranchent, d’une certaine manière : les agriculteurs du mouvement « Galline felici » refusent de vendre leurs terrains, résistent à la bétonnisation. Mais ils le font en créant et en consolidant des solidarités, localement et même avec d’autres pays. L’architecte suisse et l’animateur autrichien prennent le temps de réunir les gens, de mûrir avec eux des projets durables.

Le film prend le temps de contempler l’environnement, celui que le béton et le ciment défigurent, celui qu’offre la campagne qu’il faut apprendre à observer, comme depuis cet « observatoire des tourbières » que les habitants d’un village ont choisi de construire plutôt que de creuser un plan d’eau pour les pédalos.

 

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